Qui a dit que les gouvernements en Algérie se suivent et se ressemblent ? Le dernier remaniement ministériel qui a reconduit l’essentiel de la composante du gouvernement sortant, avec à sa tête Ahmed Ouyahia, éconduit certains ministres, procédé à de nouvelles nominations et à des permutations à certains postes ministériels vient de fournir la preuve des miracles que peut produire la gouvernance politique à l’algérienne. Est-il politiquement correct et sain que des ministres d’un même gouvernement relooké puissent, avec une telle facilité et célérité, désavouer d’autres ministres auxquels ils ont succédé, lesquels ministres furent, dans certains cas, désignés à d’autres départements ministériels, après avoir laissé sur leurs bureaux des dossiers gelés, objets de vives polémique et contestation au sein des secteurs concernés ? La révision à la baisse de la liste des documents exigés par l’administration pour la délivrance du passeport biométrique, annoncé devant le parlement par le nouveau ministre de l’Intérieur et des Collectivités locales, Daho Ould Kablia, s’apparente à un cinglant désaveu, non seulement à l’ancien ministre de l’Intérieur, Noureddine Yazid Zerhouni, mais aussi au gouvernement sortant.
Qu’est-ce qui a donc subitement changé au sein de l’Exécutif en quelques jours pour que des dossiers, que l’on présentait comme scellés et non négociables, soient rouverts et réexaminés avec une vision et une approche plus citoyenne que policière, confirmant que l’on s’était bel et bien fourvoyé dans une aventure pour le moins suspecte et attentatoire aux libertés des citoyens ? Rien en apparence. Ouyahia était et demeure toujours le premier ministre d’un même gouvernement, à quelques détails près.
D’autres exemples de décisions spectaculaires sont annoncés par d’autres départements ministériels qui occupent le devant de l’actualité, tels ceux de la Santé ou de l’Emploi et des Affaires sociales, en proie à des malaises qui n’ont pu trouver de solutions sous le précédent gouvernement. Dès sa prise de fonction, le nouveau ministre de la Santé, Djamal Ould Abbès, s’embarque au volant de l’ambulance du SAMU et annonce une série de mesures destinées à apaiser les esprits au sein de ce secteur qui a besoin d’un diagnostic lucide et d’un bon thérapeute : l’ouverture prochainement de négociations avec les médecins protestataires, le paiement des salaires non versés des médecins, le recrutement d’un millier de nouveaux médecins diplômés qui grossissent les rangs des chômeurs.
Sur la même lancée, Tayeb Louh promet de revaloriser la pension des retraités avant le mois de Ramadhan, alors qu’il n’avait pas montré le même enthousiasme sous l’ancien gouvernement. Que faut-il alors conclure de tous ces repositionnements ? Faut-il les imputer aux ministres qui auraient donc les coudées plus franches et le bras si long, pour dénouer des crises héritées de l’ancienne gestion de ces ministères ? A Ouyahia qui réalise que la politique du bâton mène à l’impasse ? A des calculs politiques ? De simples effets d’annonce ? Ou s’agit-il de gages de bonne volonté d’un gouvernement qui s’est distingué par le passé par des mesures impopulaires et qui cherche, à travers des opérations de séduction, à gagner la confiance des citoyens ?
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