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un octobre réussi

  • Tunisie, un Octobre réussi

     

    Par : Mustapha Hammouche
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    Ben Ali aura tout tenté pour assurer la survie de son système. Après avoir dénoncé, dès le 28 décembre, “la récupération politique” du suicide du jeune Mohamed Bouazizi, il montrait du doigt, le 10 janvier, les “voyous cagoulés” qui commettaient “des actes terroristes” et promettait 300 000 emplois pour 2011-2012 ; le 12 janvier, il limogeait son ministre de l’Intérieur et désignait une commission d’enquête sur la corruption et la libération des manifestants n’ayant pas “participé à des actes de vandalisme” ; le soir même, le couvre-feu était instauré pour Tunis ; le 13, il s’engageait à quitter le pouvoir en 2014, dit “avoir compris” les manifestants et promet la liberté totale de la presse et la démocratie ; le 14, il limoge son gouvernement et promet, encore, des législatives “dans six mois”, puis quitte le pays après avoir désigné son Premier ministre pour le remplacer “provisoirement”.
    Mais après son départ, ses héritiers cèdent sur le provisoire et adoptent la situation de la vacation définitive du pouvoir en proclamant la présidence par intérim du président de l’Assemblée nationale. Tout au long de ces “concessions”, le soulèvement s’est amplifié et la répression s’est aggravée. Il devient, au fil des heures, clair que les Tunisiens veulent mettre fin au système Ben Ali et exigent que le mode de transition les mette à l’abri d’une régénération du système.
    Même après le pathétique “je vous ai compris” du maître de Carthage, et y compris dans sa fuite, il n’a pas échappé aux Tunisiens et observateurs que Ben Ali n’a pas renoncé à la virtualité d’un retour et encore moins à la perpétuation d’un Benalisme sans Ben Ali.
    S’ils ne l’avaient à l’esprit, le destin du soulèvement d’octobre 1988 en Algérie conforte objectivement la vigilance du mouvement tunisien et la clairvoyante résolution d’aller jusqu’au bout de l’objectif de renversement du système politique.
    En Algérie, les réformes partielles du lendemain des émeutes d’octobre 88 n’ont pas abouti à l’instauration de la démocratie justement parce que la condition d’évacuation du système politique n’ayant pas été remplie. Celui-ci a exploité son rôle de maître d’œuvre du projet démocratique pour se régénérer. Une scène politique polluée par l’irruption programmée de l’intégrisme, l’entretien tactique du régionalisme, une liberté de presse écrite seulement, des moyens financiers suffisants pour la corrompre et convertir les opposants… Ajoutons à ces atouts, une école qui a éradiqué la citoyenneté et une société qui a troqué les valeurs de civisme contre un intégrisme religieux débridé et l’on comprend que, plus de vingt ans après Octobre, les Algériens subissent un régime encore plus autoritaire que celui contre lequel ils se sont soulevés. Ce déficit sociopolitique algérien qui explique l’impasse dans laquelle finissent toutes les initiatives contestataires en Algérie.
    Mais la Tunisie, quant à elle, en plus de ne pas subir “la malédiction du pétrole”, n’offre pas à son régime les moyens de corrompre les consciences à grande échelle et entretenir une société civile maison ; elle a fait “l’erreur” de construire une école moderne qui forme à la citoyenneté et des institutions qui diffusaient le sens de l’état dans la société. C’est ce qui explique la clarté et la ténacité de la demande populaire d’une démocratie républicaine.