LES PRATICIENS DE SANTE', DONNEZ VOTRE AVIS. - Page 25
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Madjid Mendjich
Il doit avoir près de 30 ou 40 ans et mesure entre 1,70 mètre et 1 ,80 mètre. Madjid Mendjich a été ainsi surnommé parce que le jour de son mariage, il n'est pas venu, sa femme étant déjà ailleurs, même si elle était présente à la cérémonie. D'ailleurs, Madjid Mendjich ne vient jamais, ne va nulle part, sauf une fois, à sa naissance, quand ses propres parents ont hésité, fallait-il faire un enfant de plus ? Madjid l'a compris plus tard, il est venu, pour la première fois, et c'était sa dernière hésitation. Madjid Mendjich n'est pas pour autant malheureux, il a un travail, relativement bien payé, un appartement, relativement bien conçu, et une femme, relativement bien élevée. Mais Madjid ne va plus nulle part, quand on l'invite à une soirée, un dîner, un petit-déjeuner ou un café, il répond simplement, mendjich, sans excuse ou alibi, ce qui a conforté son surnom. Mais si Madjid ne va nulle part, il a quand même une philosophie, vision de la vie pour attendre la mort, le seul endroit où il doit bien aller un jour ; Madjid sait que tout peut arriver dans la vie, il ne faut pas y aller mais attendre et laisser les choses venir d'elles-mêmes, si elles arrivent. Madjid ne va ni aux enterrements, ni aux fêtes, ni dans les bureaux de vote quand il est convoqué pour un renouvellement. Pire, quand il a obtenu son baccalauréat, Madjid n'est pas allé le chercher sachant qu'on peut travailler avec un salaire supérieur à celui d'un universitaire sans avoir le baccalauréat. Ses factures, Madjid ne va pas les payer, il a choisi le prélèvement automatique, ses amis, il ne va pas les voir, il attend simplement qu'ils viennent chez lui. Madjid, comme les autres, va sûrement être invité à signer la nouvelle Constitution, à laquelle il n'a pas participé. C'est sûr, Madjid n'ira pas. Madjid n'ira nulle part, car il sait qu'il est nulle part et que là où il est, c'est sûrement mieux qu'ailleurs. Chawki Amari
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Tartag houm
C'est ainsi, des noms apparaissent puis disparaissent peu après, au gré des événements qui se font et se défont par oubli collectif. La seule constance est dans cette infinie course-poursuite entre voleurs et policiers, qui dure depuis un million d'années. Depuis quelques mois, par contre, tout le monde ne parle que des voleurs, Sonatrach en l'occurrence, face visible de l'iceberg fondu dans l'eau de mer de la matrice. Mais depuis quelques jours, on parle des policiers, ces incorruptibles chargés de débusquer le méchant.
La justice étant sourde, aveugle et hémiplégique, c'est au DRS, organe extrasensoriel, qu'a été donnée la prérogative de mettre quelques kilogrammes d'honnêteté dans un monde de brutes, et plus particulièrement au général Tartag, grand pourfendeur de terroristes. Tartag va certainement tartguer tous les voleurs, mais si les officiers du DRS sont connus pour travailler avec d'étranges pseudos qui ressemblent à ceux du raï – cheb Toufik, cheb Tarik ou cheikh Smaïl – pour Bachir Tartag, on ne sait pas si c'est son vrai nom.
Sauf que si réforme de la Constitution il doit y avoir, elle devrait aussi se pencher sur le cas du DRS. Quels sont ses pouvoirs ? Doit-il remplacer la justice et faut-il lui retirer la prérogative judiciaire ? Qui le contrôle et peut le sanctionner ? Car non concerné par l'équilibre des pouvoirs ou par la loi de finances, assemblage soudé de non-élus installés dans l'autorégénération en dehors de la biologie, du contrôle populaire ou même de celui de la Présidence, le DRS pose problème et fait peur à tous par son caractère divin, omniprésent, omniscient et dont les possibilités d'intervention sont immenses. La vraie question de la vraie question est d'ailleurs liée à la prochaine élection, elle-même liée à la prochaine Constitution ; le général Toufik va-t-il voter et a-t-il déjà voté en déposant un bulletin de vote en son nom dans une urne ?
Chawki Amari
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algeria-watch
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SNPSP:ALGERIA-WATCH
Les praticiens de la Santé renouent avec la protesta
par S. E. K., Le Quotidien d'Oran, 15 avril 2013
Après une «trêve» de 6 mois, le Syndicat national des Praticiens de la Santé publique (SNPSP) a décidé d'un débrayage de 3 jours renouvelable pour les journées du 22, 23 et 24 avril, une action qui sera précédée d'un sit-in le 17 avril.
Hier, le président du SNPSP Lyes Mérabet a expliqué dans une conférence de presse au siège national du syndicat à Alger, les raisons qui ont conduit le conseil national (réuni le 10 avril dernier) à opter pour le débrayage. Les praticiens de la Santé avaient cru, selon le conférencier, au moment de l'installation du nouveau ministre de la Santé, Abdelaziz Ziari fin 2012 à une prise en charge réelle de leur dossier de revendications, surtout après le feu vert donné à la même période par le Premier ministre Abdelmalek Sellal pour que les questions liées à ce dossier soient définitivement réglées. La dernière grève du SNPSP remonte au 16 décembre 2012, mais elle a été gelée, explique Mérabet, pour «laisser du temps au nouveau ministre et de le laisser travailler dans la sérénité, d'autant qu'il nous a été promis de régler le dossier des praticiens de la Santé publique». Selon le conférencier « plus de 6 mois sont passés et nous nous trouvons à la même case». Et d'ajouter que le dossier de «revendications n'a connu aucune évolution depuis».
Les praticiens de la Santé publique remettent sur la table leurs revendications socioprofessionnelles dès le 17 avril. Ils comptent les remettre à la tutelle lors du sit-in qu'ils organiseront devant le siège du ministère de la Santé, de la Population et de la Réforme hospitalière (MSPRH) à Alger.
L'application de l'accord négocié en 2011 concernant l'amendement du statut particulier est le point cardinal de la plateforme de revendications auquel viennent se greffer d'autres points comme l'accès au grade principal et au grade de praticien en chef. Lyes Mérabet insistera sur le problème des anciens praticiens de la santé, pharmaciens, ou encore chirurgiens dentistes qui ont obtenu leur diplôme sous l'ancien système de formation avant les réformes introduites il y a quelques années. Ces derniers qui se trouvent classés à la 13 n'ouvrent pas droit à la catégorie 16 comme le sont les praticiens, pharmaciens et chirurgiens dentistes issus de la réforme. Le SNPSP revendique une équivalence des diplômes pour les 2 catégories. Revalorisation des primes du Sud qui, selon le SNPSP, doivent être calculées sur les nouveaux salaires de base et également les primes de contagion et de garde dont la rémunération doit être augmentée.
Le thème des droits syndicaux a pris une grande part au débat. Mérabet relèvera les nombreuses entorses commises à l'encontre du syndicaliste. Il signalera le cas d'infirmiers (10) et de médecins (3) qui ont été licenciés par l'hôpital de Bordj Bou Arreridj. Le conférencier signale que des «harcèlements et attaques verbales» contre le les militants syndicaux sont signalés dans des établissements de santé (Mila, M'Sila et Batna). Mérabet a estimé que les adhérents restent attachés à leurs revendications. Ils sont 11456 praticiens de la santé et 18 000 pharmaciens et chirurgiens dentistes à être adhérent au SNPSP, a-t-il indiqué.
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Le Maghreb par attouchements
Etrange coordination d’événements de part et d'autre de la ligne de front, sur le grand champ miné de l'édification maghrébine. Après Islam Khoualed, Algérien de 14 ans condamné au Maroc à une année de prison ferme pour attouchements sur un mineur marocain, c'est un épicier marocain qui vient d'être condamné, toujours au Maroc, à deux mois de prison pour attouchements sur un mineur algérien, par ailleurs fils d'un diplomate à Rabat. Echange diplomatique ou principe de réciprocité, ces deux histoires mettent face-à-face Islam, du nom d'une religion antisexuelle, et une épicerie, du nom d'un vieux commerce. Qu'en penser ? Que dans ces deux cas, si les victimes sont mineures, l'un des accusés est aussi mineur. Que dans ces deux cas d'affaires de mœurs mettant en jeu 4 personnes, il n'y a aucune femme, ce qui en dit long sur le Maghreb futur. Que si l'on parle beaucoup du prochain vice-président algérien, on ne savait pas qu'il y avait des vice-ambassadeurs.
Que le mineur algérien a été condamné à une année de prison, mais l'épicier marocain, majeur, n'a eu que deux mois. Finalement, les lectures sont nombreuses pour attoucher au Maroc, il vaut mieux être Marocain et un épicier y est mieux protégé qu'un fils de diplomate. C'est dans les conclusions que tout se complique. On peut imaginer la construction bloquée du Maghreb se redéployer sur des bases d'attouchements, discrets mais efficaces, loin des inimitiés de fond et des réunions bureaucratiques. Ou bien, au contraire, que ces deux affaires vont provoquer une nouvelle crispation entre les deux frères ennemis et préparer des attaques sexuelles de part et d'autre. En tout état de cause, si la frontière terrestre est toujours fermée, faisant de cette pudique ligne entre l'Algérie et le Maroc un record mondial, celui de la plus longue frontière fermée depuis le plus de temps, les frontières sexuelles restent bien ouvertes.
Chawki Amari
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Le capeur
On ne sait pas d'où le mot est tiré, de cap, capitaine ou caporal, du cap, avancée sur la mer qui fixe l'objectif au marin craintif, ou simplement de cape, cette large étoffe cousine du burnous qui sert à se recouvrir en signe d'allégeance. On sait simplement que le verbe caper est un verbe du 4e groupe qui se conjugue uniquement au présent et se définit comme authentiquement algérien. Dans un chapitre de la Moukadima qui a été censuré à l'époque par le ministère, Ibn Khaldoun aurait déjà parlé des capeurs, tribu basse d'origine indéterminée, connue pour embrasser les mains des princes, serrer celles des envahisseurs et porter un parapluie quand il ne pleut pas.
Grâce à un mode atypique de reproduction asexuée par soumission, le capeur a réussi à défier le temps, et ces derniers temps d'ailleurs, comme à chaque échéance de répartition des pouvoirs, on peut le remarquer ; le capeur parle haut et fort, n'a jamais honte ni peur du ridicule. Entre animal et végétal, cousin du labrador et voisin du lierre d'appartement, le capeur n'a pas d'avis, il épouse celui des puissants. Car la grande qualité du capeur est son polymorphisme, il peut assumer toutes les fonctions ; quand il est député, wali ou ministre, le capeur est le premier à être d'accord, quand il est simple citoyen, il est le dernier à protester.
Mais dans tous les cas, le capeur est aussi rapide qu'un lévrier, il sait que le premier qui cape est l'un des premiers à être récompensés. Car le capeur possède une philosophie de la vie particulière, articulée autour de la naissance, la ligature de l'appareil sexuel, le capage et la mort, qui signe simplement pour lui la fin du capage. Entre les deux, ce n'est pas pour lui une histoire de subsistance, le capeur pouvant être milliardaire et même avoir un journal ou un parti politique. Un capeur aime profondément caper et c'est à cela qu'on reconnaît un véritable capeur.
Chawki Amari
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EN ALGERIE:Entre les scandales, le pouvoir et l’opinion publique
Moment de vérité pour les juges
Imprimer Envoyer à un ami Flux RSS PartagerTest de vérité pour le pouvoir judiciaire dont l’indépendance est à conquérir sinon à démontrer face à l’avalanche sans précédent d’affaires de corruption politico-financière. «Justice de nuit», aux ordres, juges soumis et corrompus, le système judiciaire algérien cumule les tares, essuie des critiques de toutes parts.
Un Gentil* juge a perquisitionné hier, dans le cadre de l’affaire Sonatrach, les bureaux de la Présidence et le QG du DRS et a saisi une quantité de documents compromettants, etc.» Un vulgaire poisson d’avril ? Même pas. Risible, certes, la perspective ne rejoint pas moins ce vieux rêve – devenu frustration nationale – d’Etat de droit, d’une justice indépendante. «Les juges debout (les procureurs, ndlr) sont assis et les magistrats assis (juges de siège) sont à genoux pour ne pas dire à plat ventre». A 95 ans, Me Ali Yahia Abdenour fantasme encore sur une nouvelle «cour» qui sera dédiée au jugement des «puissants», des oligarques, des «intouchables de la République». Militant nationaliste, tombé dans les bras du régime naissant à l’indépendance (il était député à la Constituante, puis ministre de l’Agriculture sous Ben Bella), Ali Yahia n’en a pas moins consacré ses 40 dernières années à la défense des droits humains.
L’arbitraire, il en a vu de toutes les couleurs, toujours hideuses, dans les caves et sous-sol de l’ex-sécurité militaire, lui qui est devenu avocat à 48 ans, notamment à cause de «ça». Au banc des accusés ou comme avocat de la défense, Ali Yahia a longtemps frayé le long des cours et tribunaux révolutionnaires, les cours de sûreté de l’Etat, un Don Quichotte en robe noire faisant face aux juridictions d’exception reconduites au lendemain de l’indépendance. «La justice post-indépendance est une copie conforme de la justice coloniale. A la différence près que la justice coloniale appliquait le droit», proclame l’avocat sans donner aucunement l’impression de vouloir forcer les traits. «Cette justice a raté tous ses grands rendez-vous avec l’histoire : des crimes et assassinats politiques non élucidés, des massacres et des déplacements forcés de populations, des affaires de corruption politico- financières : les juges sont devenus des fonctionnaires de la Justice, oublient de rendre justice, de dire le droit.»
La «justice de nuit», aux ordres, des juges soumis et corrompus, Mohamed Bakhtaoui, ancien président du tribunal d’Es Senia (Oran) connaît très bien. «Des juges amateurs de crevettes, dit-il ‘’Li Yakhalsou f’lbirou taâhoum’’, qui sortent de leurs bureaux avec des sacs d’argent, j’en ai vus ; ils sont promus, sont même au-devant de la scène.» Révoqué en 2001 pour s’être opposé en 1999 à l’accaparement par la force d’un terrain à Oran par des potentats locaux du RND, proches de l’ancien ministre de la Justice, Ahmed Ouyahia, Bakhtaoui, (qui fut membre fondateur du Syndicat des magistrats et préside actuellement l’Association des magistrats révoqués) parle d’interventions «quasi- systématiques» dans les affaires judiciaires.
Belaïz et la «justice de nuit»
Pour exemple, il cite l’ex-ministre de la Justice, Tayeb Belaïz (2003-2012), avec qui il dit avoir travaillé en 1988. «Je peux vous certifier qu’il est intervenu personnellement dans une affaire de drogue traitée en première instance par le tribunal de Aïn Témouchent où des prévenus condamnés en appel par la cour de Sidi Bel Abbès à cinq ans de prison s’en sont finalement tirés avec un simple sursis.» «L’ex-ministre de la Justice, ajoute l’ancien magistrat, a fait ramener à la cour, de nuit, sous escorte policière, les juges en question et leur a intimé l’ordre de changer le verdict. Ce qui fut fait séance tenante.»Ministère de la Justice, jeudi 14 février. «Je veux des requins pas du menu fretin» dixit Mohamed Charfi, le nouveau ministre de la Justice qui succédera à Tayeb Belaïz et ses dix années sonnantes et trébuchantes à la tête de ce ministère régalien. Charfi s’adressait aux présidents de cours et tribunaux, puis plus rien. Le silence. «Ne soyons pas naïfs, confie un haut responsable de la justice, l’indépendance de la justice, c’est une notion toute relative. Souvent la raison d’Etat l’emporte sur le principe de l’indépendance de la justice. Regardez ce qui se passe ailleurs, y compris dans les plus grandes démocraties au monde dont les systèmes judiciaires réputés indépendants connaissent des interférences. Aux Etats-Unis, en Grande-Bretagne, en France !» Les magnifiques bâtiments du ministère à l’architecture arabo-mauresque, ses passages labyrinthiques de marbre pavés exhalent des relents de solennité. Un air martial.
Le silence a presque toujours été de rigueur en la chancellerie marquée au fer rouge par une décade du ministère de Tayeb Belaïz. L’ancien procureur général, président de la cour d’Oran, conseiller à la Cour suprême, homme de poigne et homme lige du président Bouteflika, est parachuté depuis 2012 à la tête du Conseil constitutionnel. Le ministère a, certes, changé de propriétaire, mais les stigmates de la «terreur» sont toujours là : dans les couloirs, on ne parle presque pas, on chuchote à peine. «Felta b’Felgua». «Ici, tu prononces un mot de travers, tu sautes», ose un cadre du ministère. Pas moyen de décrocher un rendez-vous avec le «pieux» ministre de la Justice, ancien conseiller du président Bouteflika, puis ministre de la Justice, tombé en disgrâce, car soupçonné de «Benflissisme» et enfin revenu sous les bonnes grâces du sultan d’El Mouradia. Le style et le profil de l’homme tranchent assidûment avec ceux de ses prédécesseurs réputés à la gâchette facile et amateur de chasse aux sorcières : Ahmed Ouyahia, Habib Adami et autres pâles copies de Talleyrand.
Gros budget, petite réforme
La demeure de la justice brûle, assaillie par les scandales de grosse corruption et le ministre garde des Sceaux perd la voix. «Il parlera. En temps opportun», rassure la chargée de communication du ministère. «Patientez, exhorte-t-elle, le ministre est un homme réfléchi, un intellectuel (qui) abhorre les actions d’éclat et campagnes tapageuses.» C’est d’ici d’El Biar que sont pilotés les 37 cours et 194 tribunaux d’Algérie et sont gérés les carrières de quelque 4000 magistrats, et c’est au perron de ce ministère à gros budget (157 milliards de dinars en dix ans, plus de 2 milliards de dollars) que se sont fracassées les fameuses 477 recommandations de la Commission Issad pour la réforme de la justice. Toujours plus de tribunaux, assurément moins de justice.Cour d’appel d’Alger, 25 mars. Quelques jours avant que ces lieux censés être des sanctuaires inviolables ne soient visités de nuit, théâtre d’un «cambriolage» insolite, unique dans les annales de la justice. Il est 15h, sur les écrans truffant le hall de la cour défilent en continu les 130 affaires enrôlées par la 3e Chambre correctionnelle. Des affaires de vol, d’agression, d’attentat à la pudeur, de détention et consommation de stupéfiants, d’outrage à fonctionnaire, etc : la «totale» radioscopie et bulletin de santé, de la société algérienne où violence, crimes et délits sont consommés comme autant d’«antidépresseurs bon marché».
«C’est une justice de statistiques, pas une justice de qualité censée condamner le condamnable et innocenter l’innocent», commente Me Azzedine Semalit venu plaider une affaire en correctionnelle. «Comment voulez-vous qu’un juge qui doit rédiger 130 jugements en une semaine, traiter 130 autres affaires pour la semaine d’après puisse rendre une justice de qualité ? C’est quasiment impossible», constate l’avocat. Contraints et forcés par leur hiérarchie, sous la menace de la «moufatichia», l’inspection, le bras armé du ministère de la Justice, les juges sont réduits à «faire du chiffre» : les magistrats n’ont d’autre choix que de bâcler, selon ce défenseur, les procédures, omettant les vérifications d’usage, l’audition des témoins, les rapports d’expertise, produisant ainsi une «justice expéditive, à la chaîne».
Procès expéditif, justice «à la chaîne»
Des youyous fusent du premier étage de la cour où se tient un procès en criminelle, la seule juridiction pénale où est encore maintenu un jury populaire. «Bara’a !» «Ça doit être un acquittement», suppute Me Semalit. Devant les trois magistrats et le jury populaire – dont le nombre a été réduit par la «réforme Belaïz» à deux seulement (jury en minorité pour une justice rendue «au nom du peuple») –, comparaissent deux jeunots d’El Biar accusés de plusieurs cambriolages pour des faits et actes commis en 2011 passibles de 20 ans d’emprisonnement. Dans la salle d’audience, les victimes, dont une jeune femme séquestrée par ses agresseurs, écoutent tête baissée le greffier donnant d’une voix monocorde, lecture du long acte d’accusation. Les familles des accusés, plus bruyantes, prennent place derrière. Si l’accusé principal reconnaît les faits, son complice présumé, le «guetteur», surnommé «Zorro» niera en bloc, se disant «victime d’une vengeance» nourrie par son coaccusé et ami d’enfance juste «parce qu’il croit que je draguais sa sœur». Dans sa plaidoirie, l’avocate de «Zorro» arguera du «passé clean» de son client ; l’absence de témoins oculaires ; la jurisprudence : «La Cour suprême dit qu’il ne faut pas prendre les dénonciations d’un accusé pour des vérités établies.» Le procès est plié en deux heures : «Zorro» est libre. Des procès expéditifs, l’appareil judiciaire, aux ordres du pouvoir exécutif ou de pouvoirs informels, des puissants et puissances de l’argent, en produit des tonnes.
Les fantômes du procès Khalifa
Châteauneuf. Journaliste, militant des libertés démocratiques, Arezki Aït Larbi est familier de ces îlots extra-judiciares, les centres de détention de l’ex-SM dont certains sont à quelques centaines de mètres de là. Là, précisément, où la justice n’a pas droit de cité. «C’est vers ce type d’endroits que des magistrats zélés, à l’image de ce qu’a été Abdelmalek Sayah, renvoyaient des détenus pour ‘compléments de torture’», dit-il. Récompensé pour son zèle déployé dans la répression judiciaire lorsqu’il était juge d’instruction à la Cour de sûreté de l’Etat (1982), Sayah a été promu à des postes diplomatiques et a été catapulté en mars dernier directeur de l’Office central de la lutte contre la corruption. Journaliste au Figaro, Arezki Aït Larbi a couvert l’acte I du procès Khalifa en 2007. «Autant le procès a été, selon lui, brillamment conduit par la juge Fatiha Brahimi, la présidente du tribunal, intègre et maîtrisant ses dossiers, autant il fut celui des «fantômes» de l’affaire Khalifa dont les parrains ont été superbement épargnés». Des «lignes rouges» avaient été fixées «en amont» par l’arrêt de renvoi.La chambre d’accusation a pris soin de nettoyer le dossier des personnalités sensibles : hauts gradés de l’armée, de la police, du DRS, des magistrats…, le frère du président Bouteflika, Abdelghani, avocat conseil du groupe Khalifa, cités pourtant dans l’instruction, n’ont pas été appelés à la barre. Aussi de hauts responsables dont des ministres (Bouchouareb, Tebboune, Medelci) présents aux audiences étaient cités comme témoins et n’ont pas été inculpés par la Cour suprême en dépit des lourdes charges qui pesaient sur eux.
Place Mauritania. Siège de la Commission nationale consultative pour la promotion des droits de l’homme. Veille du procès Khalifa-bis. C’est dans cette résidence fastueuse héritée du Dey d’Alger que reçoit l’avocat au cabinet prospère, Me Farouk Ksentini, président de cette instance rattachée à la Présidence. Avocat des droits de l’homme, – et de l’homme puissant – Ksentini a été le conseil du wali de Blida, M. Bouricha, du président de la Chambre de commerce de Tébessa, Garboussi et autres caudillos dit ne s’attendre «à rien» du procès Khalifa-bis, procès dans lequel il est constitué (défense de Chachoua Abdelhafid, ancien inspecteur de police devenu directeur général chargé de la protection et de la sécurité chez Khalifa Group).«Trop tard, assène-t-il : l’affaire a refroidi et Khalifa (Abdelmoumen) a mis la mer entre lui et la justice.» Les faits dénoncés, susceptibles de poursuites sont déjà prescrits pour la plupart, argue-t-il. L’avocat trouve «scandaleux» que les pourvois en cassation aient pris six ans pour être traités par la Cour suprême. «Déjà qu’on aurait dû faire l’économie du (premier) procès. C’était un simulacre, une parodie de justice.» De la justice, tout le monde, le pouvoir y compris, dit le plus grand mal. L’homme de loi ne rate en effet aucune occasion de tirer sur cette justice de «mauvaise qualité», sur la «réforme» qui s’est bornée à soigner le «décorum» des palais de justice, ses juges qui se conduisent en «domestiques», qui se déterminent «en fonction de la direction du vent». Les propos de cet «officiel», réputé proche du président Bouteflika, passent d’autant plus mal, choquent le corps des magistrats.
Juge… et tais-toi !
Beni Saf, jeudi, 8 novembre 2012. C’est dans un des bungalows d’El Nabil, complexe touristique (propriété des frères Medelci, parents du ministre des Affaires étrangères) au- dessus d’une des criques majestueuses à l’ouest de Beni Saf, qu’ont été arrêtés trois magistrats de siège et un procureur-adjoint en compagnie de vendeuses de charme, dont une mineure. L’«affaire» a fait grand bruit avant qu’elle ne soit vite étouffée : les gendarmes auteurs de l’arrestation ainsi que le dénonciateur ont été les «seuls» à trinquer. Motif : non- respect de la procédure de perquisition. Djamel Aïdouni, le secrétaire général du Syndicat des magistrats ne cache pas son désarroi face à cette affaire vaseuse.«Elle a fait beaucoup de tort à l’image de la magistrature», reconnaît-il non sans s’en prendre au sacro-saint principe de «l’obligation de réserve», épée de Damoclès suspendue au-dessus de la tête des juges, arborée très souvent par la chancellerie comme prétexte pour congédier et où mettre sur la voie de garage des magistrats insoumis. «Le devoir de réserve est une notion élastique, dit-il. Où commence-t-elle et où s’arrête-t-elle ? On ne sait pas. Un juge qui danse lors d’un mariage d’un parent à lui ; un magistrat qui exprime un avis lors d’une conférence académique, est-ce une violation du devoir de réserve ?» Article 7 du statut de la magistrature : «En toute circonstance, le magistrat est tenu à l’obligation de réserve, de se préserver de toute suspicion et attitude portant préjudice à son impartialité et indépendance.» Juge… et tais-toi ! Siège du syndicat des magistrats.
C’est au premier étage de l’ancien tribunal de Chéraga que le syndicat des juges a élu domicile. Plus de 20 ans d’existence, de beaux meubles de bureau au bois massif, identiques à ceux du ministère, dont il est devenu la succursale et un défunt esprit combatif, mort et enterré. De jeunes magistrats venus de leurs lointains tribunaux de l’Est papotent dans le secrétariat en attendant l’arrivée du patron de leur syndicat. Les juges, des «travailleurs comme les autres», parlent des dernières réductions de 50% obtenues, fruit d’une convention avec la CNAN et d’autres avantages, avec les opérateurs de téléphonie, etc.
Djamel Aïdouni essaie d’être aux petits soins de ses syndiqués surtout que les rencontres régionales du SNM (à Ouargla, Oran, Médéa, Chlef…) lui ont fait entrevoir l’ampleur de la contestation : les juges s’estimant «mal défendus», «jetés aux chiens». «Vous savez, moi j’habite un quartier populaire. C’est un choix parce que je veux rester proche de la société réelle. Il y a plein de juges comme moi qui habitent des cités populaires dans des conditions indignes et à ce jour nous ne savons toujours pas si nous sommes considérés comme des cadres supérieurs de l’Etat ou de simples fonctionnaires.»
Le premier président de la Cour suprême toucherait un salaire inférieur à 20 millions de centimes, «un salaire de wali, même pas celui d’un secrétaire d’Etat». Exit les pressions d’ordre politique, Aïdouni parle plutôt de «pressions sociales». Il s’agit aussi, selon lui, de garantir «l’indépendance matérielle» du juge, de le «mettre à l’abri de la tentation». Le secrétaire général décrit une corporation muselée, «socialement délaissée». «Nous n’avons pas le droit de grève, alors que la Constitution le permet à tous les Algériens. Nous n’avons pas le droit de briguer un mandat électif, d’être dans un parti politique. Même l’adhésion à une association est soumise à approbation de la chancellerie.»
Née dans un palais
Tribunal de Sidi M’hamed. Le tribunal est appelé à juger quelque un des plus grands scandales de corruption politico-financière de l’Algérie indépendante (Sonatrach I et II). Dans le hall du tribunal est exposée, ce samedi 30 mars, la dépouille de Amar Bentoumi, un des architectes du système judiciaire algérien. Décédé la veille, l’ombrageux avocat du PPA-MTLD (de l’OS, Organisation secrète, du FLN, des «Benbellistes» en 1966 et des «chouyoukh», les leaders du FIS en 1992), premier ministre de la Justice de la République algérienne, est parti discrètement sans voir cet Etat de droit dont il a toujours rêvé. L’indépendance de la justice reconnaît-il, au crépuscule de sa vie, est restée un «vœu pieux».«Cette justice qui rend ses jugements au ‘nom du peuple’ mais qui en réalité n’a rien à voir avec celui-ci (édition spéciale El Watan, 5 juillet 2012)» «Les quelques magistrats indépendants que j’ai connus, ajoutait-il, sont ceux de l’indépendance. Ils ont été éliminés les uns après les autres. Par la suite, il y en a eu des magistrats indépendants. Rares, mais il y en avait, vite étouffés par le pouvoir. Si on veut une justice indépendante, ma foi, il y a des règles immuables et élémentaires à respecter.» La justice est née dans ce tribunal aux airs de cathédrale, donnant échos au moindre chuchotement, de l’effort de centaines d’avocats volontaires, de cadis-juges, bachadels des mahkamas coloniales et autres employés de greffes et office de notaires et quelques magistrats français et algériens officiant dans les tribunaux marocains. C’est dans ce palais de justice qu’en octobre 1962, au 3e étage, dans quatre bureaux du parquet général de la cour d’Alger, qu’a été créée la première administration centrale de la justice, avant que celle-ci ne prenne siège à El Biar, dans les locaux d’une clinique psychiatrique abandonnée par les Européens d’Algérie.
(*) En référence au juge français Jean-Michel Gentil qui a mis en examen Nicolas Sarkozy, l’ex-président français.La réforme par les chiffres :
- 4000 : C’est le nombre de magistrats actuellement en exercice. Il devrait atteindre bientôt les 6000.
- 1200 : En matière d’accès à la justice et simplification des procédures, la réforme de la justice a dépassé toutes les espérances. L’ancien code de procédure civile était constitué de 400 pages, le code amendé en comprend plus de 1200 !
- 156 : Entre 1999-2011, le ministère de la Justice a consommé quelque 156 milliards de dinars en budget de fonctionnement et d’équipement
- 75 : Pendant la période 1999-2011, le secteur a réceptionné 75 nouvelles structures de justice en remplacement des anciens sièges dont 25 cours de justice et 43 tribunaux
- 14 : Après 40 ans de service, un juge perçoit un salaire de 14 millions de centimes. Le salaire du premier président de la Cour suprême est inférieur à celui d’un ministre délégué. Il est de l’ordre de 20 millions de centimes. Un juge débutant commence sa carrière avec 70 000 DA par mois.
Inamovibilité des juges : l’arnaque
Il s’agit là d’un principe universel, dont découle en partie l’indépendance des magistrats dont on ne trouve trace dans aucune des successives Constitutions. La loi organique portant statut de la magistrature (du 6 septembre 2004) reconnaît au juge de siège, après dix ans de service effectif, le droit à l’inamovibilité. Mais une reconnaissance spécieuse et biaisée.
L’article 26 de la loi en question évoque en effet le «droit à la stabilité» du magistrat ne dépendant pas du parquet, «toutefois, précise l’article en question, le Conseil supérieur de la magistrature peut décider de la mutation des magistrats, si les intérêts et le bon fonctionnement du service de la justice l’exigent, dans le cadre annuel des magistrats».
Mohand Aziri
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boutef et drs c'est eux qui faut inculpés
Les hauts cadres impliqués sont nommés par le Président avec l’accord du DRS
Quand le DRS et la Présidence feignent de découvrir l'ampleur de la corruption en Algérie
Samir Allam
Depuis quelques mois, les révélations sur les affaires de corruption se multiplient en Algérie. Le DRS, via son service de police judiciaire, créé il y a quatre ans, multiplie les enquêtes et les perquisitions. Plusieurs contrats signés durant la dernière décennie, notamment dans le secteur de l’énergie, sont scrutés à la loupe. L’ouverture d’enquêtes à l’étranger, notamment en Italie et au Canada, sur les conditions d’attribution douteuse de contrats pétroliers en Algérie, a poussé la justice algérienne à communiquer, en annonçant des enquêtes et des commissions rogatoires internationales.Des personnalités, considérées comme proches de la Présidence, à l’image de Chakib Khelil, sont impliquées dans ces affaires. Le président Bouteflika, après avoir longtemps observé le silence, a décidé de communiquer sur des affaires, qui, parfois, s’apparentent à des attaques contre sa personne pour l’empêcher de briguer un quatrième mandat en 2014. « S'agissant des tentatives d'enrichissement illicite et au préjudice des deniers publics et des droits de la communauté nationale, la loi s'appliquera dans toute sa rigueur, car l'Etat est déterminé à imposer le sérieux et l'intégrité dans le travail et n'hésitera pas à demander des comptes à toute personne coupable aux yeux de la loi, tout en veillant à recouvrer les droits spoliés », a promis M. Bouteflika, le 19 mars, dans un message adressé aux participants à un séminaire sur l'Armée de libération nationale (ALN), organisé à Tébessa.« La justice jouit aujourd'hui de la compétence qui la conforte dans son action », a ajouté le président Bouteflika. « Nos devoirs imposent à l'Etat d'être fort et d'exercer pleinement son pouvoir dans le respect des lois de la République, de manière à rassurer sur ses capacités à protéger la vie, les biens et la dignité des citoyens », a assuré le chef de l’Etat.Dans cette question de la corruption, les choses semblent se dérouler à un rythme rapide. Même la justice, qui a généralement besoin de beaucoup de temps pour instruire des affaires, veut montrer qu’elle travaille. Des magistrats ont été envoyés à l’étranger pour enquêter. Des perquisitions ont été menées à Alger. Et, selon nos confrères d’El Watan de ce mercredi 27 mars, de hauts cadres du secteur de l’énergie et l’ancien ministre Chakib Khelil ont reçu des convocations des juges en charge de l’affaire liée à l’attribution du contrat de construction de la centrale électrique de Hadjret Ennous à SNC Lavalin. Un contrat dans lequel on retrouve le nom de Farid Bedjaoui, considéré comme un proche de Chakib Khelil.Mais toute cette agitation pose un problème. Tout le monde le sait : à de rares exceptions près, les hauts cadres de l’administration et des entreprises publiques sont nommés par le président de la République, après une enquête du DRS. Mieux, dans chaque ministère et au niveau de chaque grande entreprise, au moins un gradé du DRS exerce comme « conseiller ».Lors de l’affaire de l’autoroute Est-Ouest, un colonel du DRS, conseiller du ministre de la Justice pendant les faits, était directement impliqué. Depuis, il a été mis à la retraite, sans jamais avoir été inquiété par la justice.Dans le même dossier, Amar Ghoul est toujours aux commandes du ministère des Travaux publics. Il prévoit même de lancer de nouveaux projets routiers et autoroutiers, à coups de milliards de dollars. Pourquoi le président Bouteflika ne lui demande-t-il pas se démissionner pour laisser la justice faire son travail en toute transparence, comme il l’a promis aux Algériens ? Les exemples similaires sont nombreux. Il est difficile de croire que l’agitation actuelle autour des affaires de corruption soit une véritable opération « mains propres » destinée à limiter ce phénomène.
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A Dubaï, Farid Bedjaoui prépare sa défense et menace d’impliquer de hauts responsables algériens Samir Allam
Farid Bedjaoui, principal suspect dans les affaires de corruption à Sonatrach, se trouve actuellement à Dubaï, aux Emirats arabes unis. Poursuivi en Italie et au Canada, le neveu de Mohamed Bedjaoui sait que la justice va finir par le rattraper.Certes, son extradition depuis les Emirats arabes unis sera plus difficile à obtenir que depuis un pays occidental. Mais il sait que la justice italienne finira par le rattraper, d’autant que d’autres scandales de corruption pourraient éclater dans ce pays. En plus de Saipem, Farid Bedjaoui aurait également aidé Astaldi, une autre compagnie italienne, à obtenir des contrats en Algérie.Grâce aux multiples commissions obtenues dans des contrats en Algérie et aux sommes engrangées via le fonds d’investissement Rayan Investment, à qui Sonatrach a confié 2 milliards de dollars, la fortune de Farid Bedjaoui et de ses frères est estimée à plus de 2,5 milliards de dollars.Les frères Bedjaoui ont touché des commissions sur plusieurs gros contrats en Algérie : l’autoroute Est-Ouest, les chemins de fer, l’énergie et l’eau. Grâce à ces sommes, ils possèdent des biens dans de nombreux pays : Canada, France, Espagne, Emirats arabes unis, etc. Aujourd’hui, le spectre de la faillite plane sur la famille.Selon nos sources, Farid Bedjaoui a tenté d’entrer en contact avec les autorités algériennes pour « négocier ». Mais ses émissaires n’ont eu aucune réponse encourageante. En cette période, où les enquêtes sur les scandales de corruption se multiplient, tout le monde cherche d’abord à se protéger. Mais Farid Bedjaoui estime qu’on lui fait porter le chapeau dans des affaires de corruption dans lesquelles beaucoup de personnes en Algérie, dont de hauts responsables toujours en poste, sont impliquées, selon les mêmes sources. A des visiteurs qu’il a reçus chez lui, il y a quelques jours, il a affirmé qu’il ne tomberait pas seul. S’il est pris par la justice, il dénoncera ses complices… -
commentaires sur l'algerie sur le post au dessous
akfadou07 le 03.04.13 | 12h23
Les frasques de Chakib
Bizzare effectivement. Car j'ai lu ou entendu aux infos que echakkib a vendu son logement de la cite chaabani pour la Modeste Somme de 30 milliards.
La sociale pour la Révo le 03.04.13 | 12h22
Khelil est-il vraiment venu en Algér...
On peut essayer de concevoir qadrat (gamilat) allah pour organiser achkayar par télépathie, ou par Mobilis, Djezzy et Nedjma. Mais beaucoup de fantômes, dénommés aussi citoyens, affirment l'avoir aperçu, ... la suite
Moh la Science le 03.04.13 | 11h27
Le parapluie à la mode Medelci
-M. Mourad MEDELCI, Ministre des Affaires Etrangères : Azul, Professeur, je viens vous consulter à Guezgata car l’affaire est d’importance.
-Professeur Qibu : Pourquoi vous et pourquoi ce parapluie.
-M. Mourad MEDELCI : Les affaires pleuvent bas. Voilà pour le parapluie. Pourquoi moi. Les affaires sont étranges. Ce n’est pas le propos. Le propos est que beaucoup de nos gouvernants ont démissionné en regard des scandales à répétition. D’autres ont pris des vacances pures et simples sans billet de retour. Je suis à la recherche de nouveaux talents, du sang neuf, des jeunes pour restructurer le pays. Et sans faire de poésie, l’Algérie est un mouroir qui dans mes bras va choir.
-Professeur Qibu (très modeste) : Vous avez été bien inspiré de frapper à notre porte car nous avons du pétrole à Illoula Oumalou et nous avons des idées. Notre village regorge de talents comme un peu partout en Algérie. Cela fait peine à voir autant de compétences inexploitées.
-Citez-moi quelques exemples
-Professeur Qibu : je commence par Da Cha3vanne Oua3li qui a un doctorat en biologie marine. Aucun employeur n’en a voulu. Il s’est reconverti en bistrotier et le voilà qui sert des coups de rouge.
Autre exemple : Notre serveuse, Jolie Môme, qui a un doctorat en économétrie, vous savez ; les mathématiques appliquées à l’économie. Aucune banque, aucune compagnie d’assurance n’en a voulu. Motif : elle ne porte pas de soutien gorge ce qui fait que quand elle marche, sa poitrine tressaute. Cela est de nature à perturber les hommes, ce qui est inadmissible dans un pays où les femmes sont, d'ordinaire, battues. Je ne comprends pas, car, moi, quand je marche, mes couilles tressautent aussi et ça n'a pas l'air de beaucoup déranger les gens.
Nous avons, également, une foultitude de compétences comme Monsieur Newstiti qui excelle dans la chose nucléaire, Monsieur l’Andalou, un rescapé de la guerre civile d’Espagne, fin connaisseur des corridas et du combat rapproché, et un tas d’autres sujets brillants.
-M. MEDELCI : Et vous ?
-Professeur Qibu (très, très, très, très modeste) : je suis médecin
-M. Mourad MEDELCI : et votre ami, Sa Piété ?
- Professeur Qibu : Un vieux qui enseigne depuis 40 ans et qui ne veut pas partir. Il cherche un 5ème mandat. Il n'a pas son bac mais il a son Certificat d'Etudes et maîtrise admirablement les tables de multiplications. Nous avons fêté son Certificat d'Etudes à Pigalle dans un bordel clandestin. Belle époque…de la bière et des putes. -
no moment
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Un parapluie contre la boue
Il fait beau mais les coups bas vont pleuvoir, c'est ainsi qu'un journaliste a résumé l'année à venir, où il faut s'attendre absolument à tout, sauf à des méthodes modernes et démocratiques d'affrontement. C'est d'ailleurs tout le paradoxe de cette prévision, les coups bas viennent d'en bas, mais la pluie d'en haut, et l'absurdité verticale du propos renseigne sur cette difficile période qui débute, l'Algérie ne sachant pas faire simple. De fait, chaque information, confirmation ou démenti sera à prendre avec beaucoup de précautions, chaque affaire à observer avec infiniment de recul et chaque dossier à décortiquer sous tous les angles.
Mais pourquoi les affrontements sont si opaques et tordus ? Parce que quand un homme veut dire quelque chose à un autre homme, il le dit à son voisin, sachant que les voisins rapportent tout, surtout les mauvaises nouvelles. Quand un homme a un problème avec un groupe, il frappe d'abord sa femme, sachant qu'une femme est coupable, surtout si elle n'a rien fait. Enfin, quand un groupe a un problème avec un autre groupe, il envoie ses soldats, laissant le général dans le poste de commandement avec ses trois puces, Mobilis, Djezzy et Nedjma.
Petit exercice avant d'entrer dans la violente campagne qui s'annonce, comment lire ces informations : Chakib Khelil a quitté l'Algérie et la DGSN ne l'a pas arrêté parce que la justice ne le lui a pas demandé, mais a arrêté le cambrioleur du Palais de justice d'Alger pendant que l'appartement de Khelil était visité par le DRS, qui possède aussi la prérogative judiciaire et des officiers dans les aéroports. Une infinité de lectures s'offrent, dont celle-ci, réservée aux familles, le DRS, la DGSN, la justice et la Présidence sont les 4 enfants d'un même couple, qui a fui le pays en barque il y a longtemps. En fait, peut-être que la vraie question est celle-ci : Khelil est-il vraiment venu en Algérie ?
Chawki Amari
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Amal Triki, la première dame d'Algérie
Madame Amal Triki, je ne désire nullement vous attaquer en usant d'Internet. Pourquoi le ferais-je ?
Lorsque Boutef a secoué le joug de l'occupant et remporté la victoire, il n'a pas remarqué que les Barbus tissaient leur toile en silence et avec méthode afin de tenter d'imposer une dictature plus sauvage encore que la sienne. Les Barbus ne sont plus à Alger, ni à La Redoute et ni au Clos-Salembier. Amal, la fille du diplomate algérien au Caire YahiaTriki n'était pas faite pour demeurer parmi des hommes sans foi (enfin ils ont la leur) ni loi. Soit, mais alors pourquoi n'est-elle pas à Alger puisque les Barbus semblent éliminés du paysage politique à Alger? En tous les cas, le peuple ne connaît pas Amal.
Boutef est né en 1937. Il s'est marié en 1990 à l'époque où les Barbus allaient entrer en scène (ou à peine plus tard en 1992). Calculons, il avait 53 ans et cette union est restée sans descendance. 53 ans, un peu tard pour faire des enfants, admettons, mais pourquoi pas ? Jusqu'à présent, je n'ai pas réussi à obtenir l'année de naissance de Madame.
Amal Triki devenue Mme Bouteflika, se fondra dans la nature. Elle n'est jamais apparue aux côtés de son mari ni ne figure officiellement dans son entourage. Elle a préféré l'exil à l'atmosphère délétère de son pays.
Nous savons bien qu'elle n'a pas l'allure d'une Carla Bruni mais elle a un rang à tenir.
Mohamed Benchicou a signé la biographie secrète du président Bouteflika : « Une imposture algérienne ». Lisons l'écrivain :"Nous apprenons que Bouteflika a été très proche de sa maman. Cette adoration est-elle à l'origine du curieux célibat d' Abdelaziz ? Bouteflika ira jusqu'à dissimuler son mariage.
La rue Duc des Cars où eut lieu le mariage secret.
Il se maria un vendredi d'août 1990 dans un appartement de la rue Duc-des-Cars, à Alger. Il épousa Amal Triki, fille du diplomate Yahia Triki, alors premier conseiller à l'ambassade d'Algérie au Caire. L'acte de mariage a été établi ce jour-là par un agent de la mairie de Sidi-M'hamed dépêché spécialement à l'appartement de la rue Duc-des-Cars. Amal Triki devenue Mme Bouteflika se fondra dans la nature. Elle n'est jamais apparue aux côtés de son mari, ni ne figure officiellement dans son entourage."
Faut-il le dire et le répéter, la première dame d'Algérie ne vit pas dans son pays ? Mariage blanc peut-être mais
Amal Triki vit à Paris.
Lorsque je mets en scène des hommes politiques algériens, mon jet littéraire quotidien s'épuise. Je lis :
"L'Algérie exige toujours la repentance de la France pour la colonisation". Je réponds :
Alors que fait la première dame d'Algérie à Paris ?
http//:esmma.free.mde4/ddcars.htm
Encore une image "stratégique" ! Sur cette photo (prise du Viaduc par Gérald), on voit en même temps le sommet de la rue Duc-des-Cars (à gauche) et le départ des escaliers qui "descendent" à sa source, c'est-à-dire la rue du Docteur-Trolard. Le bloc du milieu comprend lui aussi des immeubles à double accès, avec une entrée haute et une autre sur un palier des escaliers Trolard. Au fond de la rue, on reconnaît l'ancien garage Yvars (petit immeuble blanc, à gauche). Un peu plus loin, les trois fenêtres superposées appartiennent à l'école des filles de la rue d'
Estonie.
Merci à ESMMA.
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A tout péché miséricorde.
Madame Amal Triki Bouteflika, nous ne nous connaissons pas. Si nous nous rencontrions, nous pourrions peut-être nous entendre car je ne sais rien de vous. Je ne désire nullement vous attaquer en usant d'Internet. Il existe tant et tant de sujets sur lesquels nous aurions l'opportunité de discuter ou de disserter !
Aimez-vous les auteurs français ? Aimez-vous la musique ? Chopin ou Brahms ? Aimez-vous Brahms ? Tiens, c'est un titre de Françoise Sagan. Avez-vous lu Sagan ? Avez-vous lu Camus ? Les Noces, pour moi, de tout petits essais et un chef-d'oeuvre. Et Proust avez-vous cheminé sur son long chemin du temps perdu ? Quant à Gide, après avoir bien circulé dans ses Nourritures terrestres, peut-être entreprendrez-vous, comme moi, de longs voyages ?Je n'oublie point Céline, ce géant de la littérature française qui avait, lorsqu'on le relit, cent ans d'avance. Ses erreurs, son antisémitisme, je les rejette et j'aurais tant voulu qu'il fût sans tache.
J'ai vécu 24 ans à Alger et j'ai vécu près de 50 ans à Paris ou très près de Paris. Avant-hier le 07 avril 2011, ma femme et moi, nous nous sommes promenés près des quais de la Seine, et avec un groupe d'amis –anciens collègues- nous avons visité l' Hôtel de Beauharnais rue de Lille puis nous avons déjeuné à la Ferme Saint Simon. Paris au printemps fait partie de nos délices après des hivers toujours trop gris. Mais Alger me manque. Alger ma ville d'autrefois.
Votre mari a longtemps fait propagande contre la France mais c'est en France -le redirai-je encore ?- qu'il vient se faire soigner. Je sais que nous ne devons point nous interroger au sujet de sa vie privée, néanmoins pour ses adversaires, tous les coups portés sont les bons. Pensons au prince de Talleyrand qui affirmait : « Il y a une arme plus terrible que la calomnie, c'est la vérité ».
Madame, irez-vous vous aussi vous promener durant ce printemps précoce dans les rues de Paris, vous attarderez-vous devant les échoppes des bouquinistes, vous installerez-vous à une terrasse et regarderez les Parisiens se hâter, rêverez-vous peut-être sur un banc du jardin du Luxembourg , (Ah, le Luxembourg, mon parc préféré) mais votre ville, Alger, sera bien loin de vous. Vous y penserez comme on évoque une ville lointaine. Alger, c'est un autre monde qui n'est point le vôtre. C'était le mien.
Ainsi tout change, ainsi tout passe;
Ainsi nous-mêmes nous passons,
Hélas ! sans laisser plus de trace
Que cette barque où nous glissons
Sur cette mer où tout s'efface.
Dites-moi madame, que cette musique est belle. En poésie "c'est un choix heureux de mots et un croisement habile des rimes."
Ainsi Alphonse de Lamartine passe dans nos vies. Loin d'Alger, nous passons, nous glissons, tout s'efface -parfois aussi des images d'Alger- , plus de trace, que de vagues souvenirs. Alger que j'évoque en vain pour vous, Alger, dites-moi donc que vous n'en avez cure puisque vous vivez aujourd'hui dans une des plus belles villes du monde.
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"De quoi je me mêle" s'interroge un lecteur distingué, un lecteur qui fantasme sur les dames de France et qui semble oublier que le but de cet article est LA REPENTANCE. Je lui redis donc que la première dame d'Algérie vit à Paris alors que sa place est à Alger. La première dame de France ne vit pas à Rome mais à Paris. C'est tout.
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Nacera :
Est-il nécessaire de bouquiner tant d'auteurs pour être dignement Algérien ?
Un simple coup de balayage amnésique peut rendre un être humain international.
Mais, je pense que la personne qui a écrit et pose tant de questions, répond plutôt à Victor-Lévy Beaulieu :
"Ecrire est une tentation de diversion et acte insensé d'oubli de soi".
Puis-je, Nacera, répondre :Tant d'auteurs pour être dignement Algérien ? Des auteurs j'en cite bien peu mais je n'ai pas lu Victor-Lévy Beaulieu. Etre dignement Algérien. Algérien, qui ? Moi ? Mais non je suis français.
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Vous avez cru en votre Algérie nouvelle et c'est une minorité qui s'enrichit. A eux les résidences et les belles voitures. A vous les cacahuète et les logements de misère. Je ne me mêle pas ou plus des affaires politiques en Algérie puisque je n'y vis plus et que je n'ai pas la nationalité algérienne, en revanche je ne comprends pas comment Eva Joly ose se présenter à la présidence de la République française. J'accepte l'accent de Marseille ou de Lille mais pas un accent étranger, ni moi-même ni les autres Français et actuellement dans les sondages, elle est créditée d'un pourcentage de deux points.
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Durant ses quelques heures dans la capitale algérienne, Illary Clinton a offert le soutien des Etats-Unis pour mener à bien les élections législatives attendues du 10 mai, organisées suite aux réformes politiques du président Bouteflika.
Gageons que ces réformes donneront des logements aux jeunes qui désirent fonder un foyer. Il n'y aura point de miracle mais les pauvres connaîtront moins de misère. Un bruit court avec insistance en France : Les élus, les ministres et les généraux d'Algérie préparent un repli en Europe et particulièrement en France car ces élections ne seront plus manoeuvrées par le Pouvoir.
Le monde arabe évolue. Nous verrons. Le spectacle terrifiant que nous offre la Syrie (la Syrie que je connais) n'est pas encourageant.
La Syrie. J'ai mal. Saint Paul a eu la vision du Christ vers Damas.Selon Wikipedia Damas fut l'un des berceaux du christianisme et vit saint Paul prononcer ses premières prédications, notamment dans l'église d'Ananie, la plus vieille de Syrie (aujourd'hui dans le quartier chrétien de Bab Touma).
J'ai visité la ville de Damas que j'ai aimée. Quelle chance j'ai eu d'avoir pu visiter ces pays arabes avant qu'ils ne sombrent dans la folie. N'avons-nous point connu une telle folie, nous, les Européens durant la guerre de 14 - 18 et la guerre de 39 - 45 ?
(Relevé dans Wikipedia)
Fait exceptionnel, la salle de prière de la Grande mosquée des Omeyyades (Damas) contient un tombeau : celui de Jean-Baptiste, cousin de Jésus. Lorsque les Arabes conquirent la ville en 635, ils y trouvèrent en plein centre la grande basilique Saint-Jean Baptiste, qui abritait le tombeau supposé de ce Saint. Un dignitaire chrétien de la ville vint demander au calife qu'il épargne ce sanctuaire chrétien et les califes successifs préservèrent durant soixante-dix ans le grand sanctuaire chrétien. Lorsque Al-Walid Ier décida de transformer l'église en mosquée, en 705, il épargna le tombeau chrétien et fit construire la mosquée autour.
J'ai visité la grande mosquée des Omeyyades et j'ai prié devant le tombeau de saint Jean-Baptiste. Je mesure la chance que j'ai eue. -
La crêpe aux 1000 trous
75 accusés, 50 parties civiles et 300 témoins dont trois ministres, c'est le casting monstre du procès en appel de l'affaire Khalifa qui s'ouvre aujourd'hui à Blida. Pour mémoire, l'affaire avait démarré en 2003, à la fin du premier mandat de Bouteflika, après que la Banque d'Algérie eût constaté un trou de 3,2 milliards de dinars dans la banque privée. Et pourtant, pour un trou estimé à plusieurs milliards de dollars et qui devrait être qualifié de gouffre, la justice algérienne ne semble pas pressée d'ouvrir un procès. C'est pour cette raison que le principal responsable du secteur, l'ex-ministre de l'Energie, n'a pas été inquiété ni même convoqué et a pu tranquillement quitter l'Algérie. Comment a-t-il pu partir ? Ce n'est pas très important, qui vit en Algérie sait combien de trous il y a, sur les routes pour y tomber ou dans les administrations pour s'y faufiler, y compris dans les palais de justice où de petits cambrioleurs peuvent entrer se servir comme dans un café.
Comme le beghrir, la fameuse crêpe aux 1000 trous, l'Algérie a fini, en cette glorieuse fin de mandat présidentiel, par toucher le fond du trou, devenue capitale de l'incompétence et du détournement, un trou noir qui absorbe lumière, matière, temps, espace, hommes et idées neuves. Mais, qu'est-ce que le contraire du trou ? C'est une autre anomalie topologique, une bosse, un dos d'âne ou ralentisseur, surplus de matière qui pose un tout autre problème, comme celui que vient de poser Mohamed Mechati, rare survivant du groupe historique des 22, en soutenant le front du refus d'un quatrième mandat. S'étant toujours appuyé sur la famille révolutionnaire et son rôle d'historique, l'actuel Président va avoir du mal, cette fois-ci, à passer au rouleau compresseur une bosse de cette taille. Seule solution, utiliser encore une fois la justice afin de mettre la bosse Mechati au trou pour non-conformité avec la platitude.
Chawki Amari
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Néolithique, chapitre 1
Peu s'en rappellent et l'APS n'avait pas encore été créée ; la véritable révolution de l'homme a eu lieu il y environ 10 000 ans à l'invention de l'agriculture et de l'élevage. L'homme devient producteur de nourriture, il n'est plus obligé d'en quémander dans la nature et d'attendre que le couscous lui tombe dans la bouche. Cette révolution marque la fin du néolithique et de la prédation (chasse, cueillette), l'homme crée lui-même ce qu'il mange. Pourquoi ce cours sur la protohistoire ? Parce que malgré sa place de 7e pays le plus peuplé d'Afrique, l’Algérie est devenue le premier importateur de denrées alimentaires du continent. De là, il faut se poser des questions, faut-il arrêter de manger ou commencer à semer et élever ? En d'autres termes, quel type d'économie pour sortir du néolithique ? Libérale, sociale, anticapitaliste, postsoviétique, islamiste ou de type chinois ?
Champions des demi-mesures et de l'hésitation officielle, fonctionnant par sources anonymes, décrets en papier et revirements brusques, les autorités n'ont toujours pas expliqué quelle sera l'économie de demain. Des éléments de réponse viennent heureusement d'être donnés, sous la forme de deux événements survenus au même moment. Abdelamalek Sellal en visite officielle au Qatar pour signer des contrats de partenariat et des syndicalistes algériens interdits par leur pays de se rendre à un forum altermondialiste en Tunisie. A partir de là, on peut conclure que l'Algérie a opté pour le libéralisme islamiste de type pays du Golfe contre l'altermondialisme à la Chavez, poussée par ses ressources financières et la pression des marchés, l'islamisme étant devenu un vecteur de pénétration du capitalisme mondial. Pourquoi ce cours sur l'économie ? Tout comme c'est pendant l'amour que l'on réalise que c'est bon, c'est pendant les repas que l'on comprend que la nourriture ne vient pas du ciel. Mais de la terre.
Chawki Amari
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no moment
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Philosophie du dessert
Quelle est la température du point d'ébullition de l'Algérien ? A quand une émeute pour femmes ou réservée aux familles ? Quel temps fera-t-il en 2014 ? Quatrième mandat ou pas ? Vous reprendrez bien un peu de dessert ? Quand les réponses sont suspectes, il est amusant de constater que l'on peut se poser n'importe quelle question puisque personne ne vous répondra. Au mieux, on vous demandera vos papiers en vous expliquant que ce sont les policiers qui posent les questions, pas les suspects. Mais pourquoi le Président ne se représenterait-il pas ? Franchement, on n'en est plus là.
Dommage, car il y a là quand même quelques réponses. Il ne se représentera pas parce qu'il est vieux et fatigué, que les démos ne se flashent plus comme avant et qu’il a mérité une bonne retraite dans un pays lointain, à l'abri des Algériens, de la justice et des vents de sable. Non, c'est simplement parce que la Matrice, après l'avoir importé et consommé, veut le réexpédier à l'étranger pour gonfler les exportations hors hydrocarbures. Mais passera-t-il la douane ? Et qui sera le prochain Président ? Si ce n'est toi, c'est donc ton frère. Bachar Al Assad, fils de son père, a bien tenu contre le monde entier. Sauf que l'Algérie est un vrai pays d'alternance, pas démocratique mais présidentielle. Boumediène a putsché Ben Bella, Chadli a déboumediénisé l'Algérie et inculpé Bouteflika. Boudiaf a été tué, donc ça ne compte pas.
Zeroual a dit non un jour à Chadli et c'était d'ailleurs l'argument de vente aux Algériens. Bouteflika a dézeroualisé le pays, il va falloir quelqu'un pour débouteflikiser le pays, c'est-à-dire trouver un homme (et pas une femme) qui a dit non un jour à Bouteflika. Il y a bien Benbitour, mais il vient du Sud. D'autres candidats ? Non, car on ne peut pas dire non. Alors, ne dites rien. De toute façon, personne ne vous demandera votre avis. C'est d'ailleurs la seule question à régler.
Chawki Amari
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La délégation algérienne au forum social mondial bloqué pendant 5h aux frontières
La police algérienne des frontières du poste frontalier d'Oum Tboul, a bloqué pendant cinq longues heures la délégation algérienne qui devait participer au forum social mondial à Tunis, au pretexte que les bus qui transporte les participants n'avaient pas d'autorisation pour quitter le térritoire algérien.
Selon un membre de la délagation joint par téléphone, après 5h d'attente, un officier de la PAF, après une série de questions a daigné autoriser les bus a franchir la frontière, mais ...
Dès que la délégation a traversé la frontière, le même officier, pris de panique, court vers les bus pour demander aux chauffeurs de rebrousser chemin, alors qu'ils se trouvaient déjà en térritoire tunisiens.
"Les bus ne peuvent pas passer la frontière" dira t-il aux membres de lé dalégation, priés de descendre et de prendre leurs affaires, sous le regard des policiers tunisiens, qui ne comprenaient plus le comportement du pafiste algérien.
Au moment ou nous mettons en ligne l'information, la délagation algérienne est toujours au niveau du poste frontalier tunisien, à attendre un moyen de transport pour rejoindre Tunis.
Elwatan.com
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no moment
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Les Sudistes exagèrent
Des manifestations un peu partout, mais prévues par la théorie des dominos et de la contagion horizontale. Si le droit à un travail est raisonnable dans un pays qui possède d'énormes réserves financières sans pour autant savoir les fructifier, les Sudistes exagèrent quand même. D'abord, il fait beau chez eux, le temps est toujours merveilleux, immense ciel bleu sans nuage et sans emploi. Ensuite, la nature est belle et il fait meilleur de traîner à Taghit ou l'Assekrem qu'à Baraki ou Sidi El Houari. Dans ce bac à sable pour adultes où l'on peut jouer toute l'année, il faut aussi noter que la vie est moins chère et les connexions par clé USB, Mobilis, Nedjma ou Djezzy fonctionnent beaucoup mieux que dans le Nord. Les routes sont goudronnées et il n'y a pas de circulation, très peu de barrages policiers et de la sécurité en plus. Pour profiter de tous ces avantages, il est vrai qu'il vaut mieux avoir un peu d'argent.
Et pour en avoir, si l'on ne s'appelle pas Bedjaoui, Raouraoua ou Saïdani, il est obligatoire d'avoir un travail. Finalement, tout bute sur ce problème. Le travail. C'est toute l'injustice. Les travailleurs y sont envoyés du Nord et profitent des avantages du Nord et de ceux du Sud, pendant que les Sudistes, vivant au Sud, ont les inconvénients du Nord mixés aux inconvénients du Sud. Il y aurait une solution, de par la destruction accélérée des forêts du Nord et du déboisement organisé de la maigre bande verte du pays. Transformer le Nord en Sud par égalitarisme et faire de l'Algérie un immense désert, des rives du Sahel aux bords de la Méditerranée. Cette opération est d'ailleurs en cours ; dans quelques années, le désert sera aux portes du palais d'El Mouradia, après la stérilisation des terres, des hommes et des idées. Grâce à la clairvoyance des gouvernants, l'Algérie pourra devenir, en plus du grand pays d'Afrique, le plus grand désert du monde à lui tout seul.
Chawki Amari
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EN ALGERIE:Le président des sms
Pendant que les chefs d'Etat de tous les pays naviguent, font la tournée de leurs terres, petites ou grandes, et restent en contact physique avec leur société pour voir comment apporter des solutions, le président algérien continue d'envoyer des SMS. Dernier en date, un message, de loin, envoyé à un vague séminaire sur l'armée organisé à Tébessa, repris par l'officielle APS, de loin aussi. Pourquoi l'armée ? Et pour dire quoi ?
Que même caché chez lui, devant la télévision et l'ENTV qu'il ne regarde pas, il sait ce qui se passe : «La justice jouit aujourd'hui de la compétence qui la conforte dans son action» et autres «la loi s'appliquera dans toute sa rigueur». Dans son SMS, le Président ne s'est bien sûr pas posé la question de savoir pourquoi la corruption fleurit plus dans les pays autocratiques que dans les pays démocratiques. Il y a pourtant une raison qui tient en quelques mots, en attendant la 3G dont on vient encore de promettre l'arrivée pour fin mars : sans indépendance de la justice, n'importe quel haut placé peut bloquer une enquête sur lui et ses partenaires, l'Exécutif agissant directement sur la carrière des magistrats.
Difficile après d'écouter Karim Djoudi, son ministre des Finances, affirmant que «toutes les personnes impliquées dans la corruption seront jugées, y compris les hauts fonctionnaires de l’Etat» quand on sait que pour l'affaire Khalifa, des personnalités impliquées n'ont non seulement pas été touchées, mais occupent encore aujourd'hui des postes importants dans le même Etat. En 2013, peut-être qu'il faut arrêter de faire semblant, de mentir et de faire croire qu'un pays peut se développer sans séparation des pouvoirs et sans décentralisation. Ma3lich, le printemps est là et les nouvelles fleurs aussi. Les cueillir, les sentir, les manger. 3ich la vie. Question : le président Bouteflika envoie-t-il ses SMS par Djezzy, Nedjma ou Mobilis ?
Chawki Amari
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Chômeurs : le régime fantasme sur un scénario à la arouch
| © AFPCe qui guette assurément le mouvement des chômeurs, ce n’est pas l’essoufflement de ses militants. Mais l’arsenal de subterfuges que le système déploie pour faire imploser le Comité national. Petit manuel du clonage, de la diabolisation et du redressement.
Ouargla, à la veille de la manifestation du 14 mars. Une dizaine de jeunes, des chômeurs, ont pris place sur les chaises installées dans la salle. Sur le mur, des affiches, déjà abîmées, des dernières législatives rappellent que l’on se trouve dans un local de TAJ, le parti de Amar Ghoul. Un député arrive et s’installe devant eux avec trois autres militants du parti. «Restez chez vous ! Les organisateurs de cette marche obéissent à un agenda étranger visant notre chère patrie !»
Depuis quinze jours, le système tout entier s’est mis en branle pour faire imploser le mouvement des chômeurs. Dans la presse, le leader du Comité, Tahar Belabbès, est accusé de comploter contre l’intégrité de son pays depuis l’étranger, alors que l’administration refuse de lui délivrer un passeport depuis six mois. Sur les réseaux sociaux, journalistes-relais des services ou de la Présidence voient dans la moindre photo «l’implication du Qatar» qui aurait payé les leaders du Comité. Et dans le Sud, les élus et des notables locaux sont mobilisés pour casser l’appel à la marche «Milioniya». Alors que le Comité appelle à un rassemblement à Laghouat et à Oued Souf pour «un Etat de droit», des députés (de TAJ, encore) appellent à une contre-manifestation à Ouargla pour affaiblir le mouvement.
«Ces méthodes sont les méthodes classiques du pouvoir pour affaiblir la protestation sociale depuis les années 1980, explique un ancien leader associatif. Autant la répression directe pouvait fonctionner quand l’opposition agissait dans la clandestinité, autant le système ne pouvait plus y avoir recours une fois les revendications devenues publiques. Alors il a changé de stratégie. Il a utilisé d’autres techniques.» Le noyautage, la récupération, le clonage, la décrédibilisation.
Infiltration
«Le principe est simple : tu crées ton association. On t’envoie des adhérents tous gentils qui finiront pas se retourner contre toi, raconte un proche des chômeurs du Sud. Soit ils y parviennent, ils te sortent et ils vident ton association de sa substance. Soit ils restent minoritaires et montent une dissidence qui deviendra un clone de ton association.» Les associations ne sont pas les seules visées. Les syndicats ont aussi payé très cher leur volonté de s’autonomiser de l’UGTA. Là encore, la technique est imparable : «Là où un véritable syndicat autonome appelle à une grève le samedi, le «faux» syndicat, qui prétend avoir les mêmes objectifs, appelle à une grève un autre jour. Ou la veille, déclare que le gouvernement a accepté la plateforme des revendications et que le mouvement est levé», explique Yacine Zaïd, syndicaliste et militant des droits de l’homme.
En 2009, un rapport toujours d’actualité du Comité international de soutien au syndicalisme autonome algérien écrivait : «Dans l’Algérie des années 2000, animer un syndicat autonome consiste autant à défendre les travailleurs qu’à esquiver les manœuvres incessantes de déstabilisation, d’infiltration et de corruption du pouvoir. Les organisations syndicales indépendantes, en refusant toute sujétion autre que celle due à leurs adhérents, sont la cible principale de l’action des services de la police politique de l’armée, le DRS.»
Le Syndicat national autonome des personnels de l’administration en sait quelque chose (voir encadré ci-contre). En politique, on appelle cette tactique le «redressement». Quasiment tous les partis historiques ont eu à en subir les redoutables effets ces derniers mois. En 2009 déjà, le CISA détaillait la règle du jeu : «Les partis légalisés, ayant encore une base réelle et une direction indépendante du pouvoir, ont été systématiquement depuis 1990 l’objet de manœuvres de divisions internes. Scénario classique : des militants ‘‘dissidents’’, agissant sur ordre, décident d’un congrès de ‘‘redressement’’. Une ‘‘direction’’ est élue dans les conditions les plus illégales et le parti passe sous la coupe du pouvoir.»
Frontières
L’autre carte jouée par le système, c’est celle de la régionalisation. «En 2001, le pouvoir a réussi à régionaliser le mouvement citoyen de Kabylie en lui attribuant des leaders d’opinion qui ne pouvaient avoir une adhésion nationale, se souvient Karim Tabbou, ancien secrétaire général du Front des forces socialistes. Il est même allé très loin en poussant certains à réclamer l’autonomie pour empêcher le courant de prendre une envergure nationale. Sa technique : fixer des frontières et mobiliser les spécificités régionales, les archaïsmes, la corruption et la cooptation de faux représentants.»
Pour l’ancien leader du premier parti d’opposition, ce calcul est une erreur, car le pays ne peut être fort et stable que grâce à une société civile solide. «Des jeunes qui revendiquent ont un projet national, contrairement au pouvoir qui est un club d’amis qui prône le régionalisme. Le pouvoir politique ne peut être fort que par le soutien de sa population.» Là réside tout le paradoxe. Car le régime casse les contre-pouvoirs pour assurer son maintien. «Le problème, c’est que le régime attaque toute force naissante et critique en créant un clone pour la casser, observe Mouloud Boumghar, juriste. Sa démarche est une démarche de destruction. Il est incapable de susciter un engouement spontané qui lui soit favorable et lorsqu’il crée des syndicats ou des associations à sa solde, ils bénéficient de la complaisance de l’administration et n’attirent, avec tout l’argent que le pouvoir déverse sur eux, que les opportunistes. Avec le clonage, il crée de la confusion et avec «sa» société civile, il achève de détruire l’image des syndicats et associations aux yeux des Algériens.
L’objectif est clair : la décrédibilisation de la société civile pour susciter le rejet et la démobilisation.» Un militant associatif du Sud résume : «Pour le pouvoir algérien, la respiration normale de la société constitue une menace. Bien sûr, ces techniques de gestion de la société ne sont pas propres à l’Algérie. Tous les régimes autoritaires fonctionnent comme ça. En France, par exemple, les RG recueillent des informations et leur travail s’arrête là. S’ils les utilisent, c’est pour protéger les intérêts du pays à l’étranger, pas contre leurs propres citoyens au moment où ils exercent leurs droits constitutionnels.»
L’objectif de ces manipulations ? Couper les têtes pour dire : «Vous voyez, il n’y a pas de leader, ce sont de simples jacqueries.» Ou empêcher l’émergence d’un leader naturel pour ne négocier qu’avec les leaders que le régime a lui-même fabriqués. «Une logique contre-productive, note un proche du Comité des chômeurs. Car en faisant émerger celui d’à-côté, qui leur assure médiocrité et allégeance, ils cassent la valeur travail/mérite.» Détail rassurant : le complot ne marche pas à tous les coups. «Parfois ils réussissent – comme lors de l´élection présidentielle de 2004 où l´on a vendu avec maestria la thèse de la «neutralité de l´Armée» par exemple, les gens ont cru jusqu’au bout que l’armée était neutre, rappelle le politologue Mohammed Hachemaoui, chercheur au German Institute for International Affairs de Berlin.
FIS
Parfois ils échouent. Avec le FIS, l´appareil prétorien n’a pas compris qu’il avait en face de lui un parti populaire, un parti de masse. Lors du congrès de Batna en 1991, les gens cadres intermédiaires du FIS avaient fini par comprendre le piège de la grève insurrectionnelle de juin 1991 : ils ont décidé d´écarter le chef de l’organique du parti, Saïd Guechi, tant il était perçu comme le relais du DRS de la police politique. Une nouvelle direction menée par Abdelkader Hachani a émergé, déjouant ainsi complètement les plans de l’appareil autoritaire.
Pis, Hachani s’est révélé un politique : il a écarté les radicaux aussi bien que les éléments soupçonnés de rouler pour la police politique, et évité l’implosion du parti. Modéré, il demandait le respect de la Constitution de 1989. Le complot de la grève insurrectionnelle du FIS a certes permis à l’appareil autoritaire d’atteindre son premier objectif immédiat, celui de faire tomber les réformateurs du gouvernement, mais a échoué à atteindre son objectif ultime : celui de reprendre le contrôle de la transition par la récupération ou l’émiettement du FIS.
Piégé par Hachani, qui s’est de surcroît rapproché, entre les deux tours des législatives de décembre 1991, du FLN de Mehri et du FFS d’Aït Ahmed, l’appareil autoritaire n’avait plus d’autre choix pour arrêter la transition démocratique avant qu’elle n’atteigne son point de non-retour, que la solution du coup d’Etat. Le coût politique, humain, social, économique et moral de cette logique de survie du régime autoritaire est énorme. Ses conséquences sont visibles aujourd´hui encore.»
Les manipulations peuvent-elles miner la solidarité des chômeurs ? Il est encore trop tôt pour le dire. Le mouvement reste fragile. «Même s’il fait preuve d’une certaine maturité en déjouant toute tentative de récupération et tout débordement», comme l’observe le sociologue Saïb Musette. «Il est menacé par un double danger, estime Fodil Boumala, un des fondateurs de l’ancienne Coordination nationale pour le changement et la démocratie (CNCD) qui a aussi explosé en plein vol après quelques mois d’existence, malmenée par le régime mais aussi (et surtout ?) victime de luttes partisanes internes. D’un côté, par les tentatives de récupération du pouvoir. De l’autre, par celles des mouvement dits ‘‘d’opposition’’, comme Rachad (les ex-FIS à l’étranger, ndlr).»
En tardant à réagir et en jouant le pourrissement, autre technique, le régime pourrait également parvenir à le neutraliser. A moins qu’il ne décide de distribuer la rente sous forme de budgets et d’emplois, ce qui aurait le même effet. Mais le mouvement développe aussi, de façon consciente et inconsciente, des parades à ces stratégies de sape. L’inéluctable politisation de revendications d’abord économiques (accès à l’emploi, à la formation, à un salaire) en est une.
Le dernier communiqué du Comité — «Toutes les décisions du gouvernement à la suite du dernier mouvement de revendications ne peuvent être appliquées en l’absence d’institutions propres et crédibles qui appliqueraient la loi sur le terrain» — rend très clair le tournant qu’il est en train d’amorcer. «Depuis 2011, on nous dit qu’il faut rester sur des revendications socioéconomiques, s’insurge un militant. L’Etat est d’accord quand on réclame du pain, du sucre ou des emplois, mais au nom de quoi on n’aurait pas le droit de parler de politique ?»
Rachid Aouin, membre du Comité, essaie de minimiser : «Nous n’appelons pas au ‘‘départ d’un régime corrompu’’, nous voulons simplement que les hommes adéquats soient placés dans les postes adéquats. Il faut des institutions crédibles pour bien appliquer les mesures promises.» Mais pour le politologue Mohammed Hachemaoui, il n’y a rien de plus «politique» que la revendication d’un Etat de droit. «Dénoncer des inégalités socioéconomiques est profondément politique car cela revient à dénoncer la corruption Refuser de parler avec les instances du pouvoir formel et exiger de discuter avec les représentants du pouvoir réel révèle le niveau de politisation élevé des leaders de ce nouveau mouvement social, assure-t-il.
Statu quo
En Tunisie, le mouvement social du bassin minier de Gafsa, en 2008, ne revendiquait pas la chute du régime ; ses revendications n’en étaient pas moins démocratiques, donc politiques. Ces six longs mois de résistance tenace face à la dictature de Ben Ali constituent même le socle de la révolution tunisienne. Tahar Belabbès et ses amis, en déjouant les dispositifs de la répression et du clientélisme, ont administré un effet de démonstration. Leur mouvement social constitue de ce point de vue le point de départ d’un nouveau cycle de contestations. Or, la corruption politique, qui colonise l’Etat et génère le mal-développement, creuse les inégalités et alimente la prise de parole des laissés-pour-compte. Cette contradiction qui habite le système algérien ne peut pas tenir longtemps avec un statu quo autoritaire.»
L’autre force du mouvement, c’est sa cohésion interne. «Malheureusement pour le pouvoir, Tahar Belabbès ou même Abdelmalek Aïbek (le numéro 2 du Comité, ndlr) sont maintenant très connus. Et si un communiqué est diffusé sans qu’aucun des deux ne le signe, les chômeurs vont se méfier», assure Yacine Zaïd. La politologue spécialiste de l’Algérie à la Fondation sciences et politique de Berlin, Isabelle Werenfels, constate aussi que «la technique du pouvoir pour neutraliser ce genre de mouvement consiste à créer de la méfiance à l’intérieur même de ces initiatives. Or, dans ce cas précis, cette tâche lui est difficile parce que la proximité qui règne entre les chômeurs (réunions de quartier, leaders proches et bien identifiés…) crée justement de la confiance interne.»
Résultat : à Laghouat, les chômeurs qui manifesteront ce samedi passeront aussi un message au wali. «Pendant que les meneurs étaient jetés en prison (condamnation à un mois de prison ferme pour des manifestants début mars, ndlr), le wali de Laghouat choisissait de recevoir ceux qui l’intéressaient, rappelle Yacine Zaïd. Les chômeurs ne sont pas dupes : ils comptent bien lui dire que ces gens-là ne les représentent pas.»
Abdelmalek Aïbek regarde aussi avec beaucoup de recul les mouvements parallèles en train de se former. «Une tactique prévisible. La rue est consciente de tout cela. La preuve, les députés que le gouvernement utilise comme des pompiers ont été chassés par la population à Ouargla !» Isabelle Werenfels pense que c’est de cette adhésion que le Comité peut tirer sa plus grande force. «Si ce mouvement a l’adhésion de différentes couches sociales, des femmes notamment, il pourra mobiliser encore plus de segments et il sera alors plus difficile au pouvoir de le casser. Et s’il échappe en plus aux cercles de zaouïas et des tribus, il sera encore plus compliqué de le diviser.»
Sidi Bouzid
Enfin, les médias dont les réseaux sociaux, contribuent aussi à rendre la manipulation plus visible. «Le pouvoir pouvait bien accuser les arouch de séparatistes, personne n’était là pour dire le contraire à part eux. Aujourd’hui, il existe des images pour contrer son discours, note Yacine Zaïd. Lors de la manifestation du 14 mars à Ouargla, tout le monde a vu à la télévision les militants du Comité hisser le drapeau national !» Le sociologue Saïb Musette préfère voir dans le succès de la manifestation du 14 mars et l’absence de réponse policière «une nouvelle donne» qui «augure d’un changement dans l’écoute de la société civile. Le dialogue social devient possible. C’est de cette manière que les principes de la non-violence peuvent être intériorisés de part et d’autre».
Le gouvernement a même demandé à rencontrer les chômeurs du Comité. Pour Fodil Boumala, le gouvernement n’a plus le choix. «Depuis 1999, le discours officiel a toujours mis en avant les ‘‘réalisations socioéconomiques’’ en mettant de côté les réformes de l’Etat, la justice, la gouvernance. Il a voulu banaliser les revendications politiques et répondre grâce à la rente aux revendications socioéconomiques.
Mais cette démarche a échoué. Il se retrouve maintenant dans l’impasse. Alors il fait comme il a toujours fait : entre la carotte et le bâton, il improvise.» Isabelle Werenfels considère aussi que le système réagit aussi «en retard» comme il a l’habitude de le faire face à ce qui survient «en périphérie», alors que «les mouvements y sont plus profonds», puisque loin du centre, ils ont pris le temps de se construire et d’émerger. «Dans la mentalité du pouvoir, pas seulement en Algérie, en Europe aussi, le danger ne peut venir que des grandes villes. Dans le Sud, le pouvoir voyait venir d’autres dangers : terrorisme ou instabilité régionale, remarque-t-elle. En Tunisie, le gouvernement délaisse complètement la misère des régions intérieures, comme Gafsa et Redeyef. Ennahda n’a pas retenu la leçon de Sidi Bouzid…»
Les clones n’auront pas la peau du Snapap
«Si le vrai Snapap, dirigé par Rachid Malaoui, résiste à l’implosion, c’est d’une part parce que son syndicat n’a pas offert le terrain favorable à la manipulation, reconnaît Mouloud Boumghar en parlant du président du Syndicat national autonome du personnel de l’administration publique. Il a réussi à préserver l’indépendance du vrai Snapap à l’égard du pouvoir et aussi le mettre à l’abri des luttes partisanes en insistant sur l’autonomie du syndicat à l’égard de tout parti politique, même démocrate et de gauche.»Après une première tentative de clonage en 2002, le Snapap est virussé par un clone en 2004. «Ses dirigeants ayant refusé de soutenir la candidature de Abdelaziz Bouteflika à la présidentielle d’avril, un «dissident» isolé organisa un congrès qui bénéficia du soutien actif de l’administration, peut-on lire dans le rapport 2009 du Comité international de soutien au syndicalisme autonome algérien. Immédiatement ce Snapap-bis reçut une subvention, alors que le Snapap n’eut droit qu’à de dérisoires soutiens conjoncturels des pouvoirs publics. Au mépris de la loi et de la réalité factuelle, la justice a attribué au Snapap-bis le petit appartement (avec la documentation et le matériel entreposés) qui servait de siège au syndicat. L’expulsion manu militari des occupants légitimes s’est effectuée avec brutalité et sans aucun recours possible.»
Presque dix ans plus tard, Rachid Malaoui, le président du Snapap, tient bon face à celui qui est présenté comme le véritable interlocuteur du pouvoir à la télé, Belkacem Felfoul. «Il faut dire qu’il mène des campagnes de sensibilisation sur le clonage auprès de sa base et des travailleurs, ajoute une militante. Nous sommes très au fait des menaces qui pèsent sur notre cohésion.» Et Mouloud Boumghar d’ajouter : «Il a aussi aidé à la création des collectifs — chômeurs, bloggeurs… — a su tisser un réseau d’amitiés syndicales à l’international, qui lui donnent une bonne visibilité et permet de distinguer le vrai syndicat qui défend les droits des travailleurs du faux, fruit du clonage, relais du régime auprès des travailleurs. Enfin, et c’est très important, le vrai Snapap a des positions claires sur l’articulation des luttes sociales et des luttes pour les droits de l’homme et la démocratie. Il est très actif sur le terrain de la défense des droits de l’homme et des libertés publiques (liberté syndicale, d’association, de réunion, droit de grève...) et de la lutte pour la démocratie. Cela fait une très nette différence avec son clone.»
6 victimes du noyautage
1-Le Mouvement culturel berbère
Dans les années 80, le mouvement demandait la reconnaissance de tamazigh comme langue officielle. Mais après «l’ouverture» de 1989, des leaders comme Ferhat Mehenni, Saïd Sadi ou Mokrane Aït Larbi ont voulu structurer le mouvement en parti politique, le RCD. Une initiative qui a déplu aux éléments FFS du MCB qui ont, du coup, accusé le pouvoir d’avoir divisé le mouvement. C’est de là que naîtront des implosions en série (trois grandes) jusqu’à «l’ultime» étape : la création par Mehenni du MAK et d’un «gouvernement kabyle provisoire».
2-Le Parti social démocrateLe premier parti agréé en 1989 a vite été victime de la toute première opération de redressement. Porté par des avocats, des universitaires, des artistes des commerçants, ce parti d’élite mené par Abderrahmane Ajrid a rapidement effrayé le régime. Une crise «préfabriquée» scindera le parti en deux tendances et enterrera la formation politique très vite. Depuis, la pratique s’est répandue.
3-Les arouchLe pouvoir a récupéré des éléments actifs (qu’on appellera les «dialoguistes») de ces comités de village, qui ont pu fédérer d’autres membres. C’est une forme de corruption par cooptation. Le pouvoir a pu les diaboliser (régionalisme) avant d’en récupérer une partie après une longue période de pourrissement pour que le mouvement s’essoufle.
4-Le syndicat des journalistesLe combat des journalistes algériens, depuis les années 1970, a été la cible du régime. Le premier mouvement structuré, le MJA, juste après Octobre 1988, a vite implosé sous la pression des luttes idéologiques internes, en apparence. L’AJA, au début des années 1990, a connu le même sort en plein déchirements politiques qui facilitèrent le noyautage et l’implosion. Le SNJA, créé au milieu des années 1990, a été grossièrement récupéré par la police politique. Ne survivra que le SNJ depuis 1998, qui fait face à des divisions de leadership et qui voit se créer en parallèle le FNJA, affilié à... l’UGTA !
5-Les syndicats autonomes
Pour le Comité international de soutien au syndicalisme autonome algérien, le Conseil national autonome des professeurs de l’enseignement secondaire et technique (Cnapest) de Larbi Nouar, actif depuis le début des années 2000, n’a obtenu son agrément que le 10 juillet 2007, quasiment en même temps que son clone, le Snapest de Meziane Mériane, (les prétendus dissidents ont en effet – après hésitations dues à l’adoption tardive d’une « stratégie» – légèrement modifié le nom de l’organisation). Le clonage concerne même les regroupements de syndicats autonomes. Créée en avril 2006, l’intersyndicale de la Fonction publique (IAFP), réunissant les authentiques syndicats autonomes, s’est vue immédiatement dupliquée par un clone dénommé «Coordination des syndicats de la Fonction publique ».
6-La Ligue des droits de l’hommeQue reste-t-il de la Ligue algérienne de défense des droits de l’homme (LADDH) de maître Ali Yahia Abdennour, des années 1990 ? Des divisions. Deux ligues, l’une, aile Hocine Zahouane et l’autre, aile Mostefa Bouchachi (remplacé par Noureddine Benissad). Le pouvoir ne leur aura jamais pardonné de mettre sur la table le dossier des disparus et des exécutions extrajudiciaires, de défendre les islamistes dans les tribunaux.
Une crise précipitée par ailleurs par l’absence de stratégie, le centralisme (pour ne pas dire le zaïmisme), les luttes partisanes autour du FFS à l’intérieur même de la Ligue. Quant à la première, la Ligue algérienne des droits de l’homme, basée à Constantine sous la houlette de Boudjemaâ Ghechir, se retrouve de plus en plus isolée.Adlène Meddi, Mélanie Matarese
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Révision constitutionnelle et succession A quoi joue Bouteflika ?
zoom | © Photo : H. LyèsLa dernière ligne droite avant l’élection présidentielle du mois d’avril 2014 vient d’être entamée : l’annonce d’une révision de la Constitution dans le courant de l’année 2013 vient d’être officiellement faite par le Premier ministre, Abdelmalek Sellal.
Et sans le dire aussi clairement, l’annonce prévoit une réforme en profondeur du dispositif électoral. Le Premier ministre a, en effet, affirmé que le projet de réforme/révision constitutionnel «sera soumis à un référendum populaire, dans le cas où l’équilibre des pouvoirs sera modifié». Or, qui dit modification de l’équilibre des pouvoirs, dit changement de nature de ceux existants : la Constitution actuelle, que le président Bouteflika a toujours dit ne pas aimer, a mis en place un système hybride, ni totalement présidentiel, malgré les pouvoirs très élargis qu’elle offre au Président, ni parlementaire, malgré que, théoriquement, l’APN dispose de vrais pouvoirs qu’elle n’a jamais voulu ou pu exercer. Il est donc assez logique d’imaginer que le président Bouteflika optera pour une Constitution qui élargira encore plus les pouvoirs du chef de l’Etat et instaurera un régime véritablement présidentiel. Qu’est-ce qui changera donc par rapport à la situation actuelle ? Celle-ci est caractérisée par une mainmise totale du Président sur l’ensemble du système politique en place. Bien que la Loi fondamentale actuelle ne le lui permette pas, il est la seule vraie source du pouvoir et son bénéficiaire unique : il en use et en abuse à sa guise.
Mais si Abdelaziz Bouteflika, de par sa personnalité et la place inexpugnable au sommet du pouvoir qu’il a acquise à travers une série de stratagèmes au cours de ses deux premiers mandats à la tête de l’Etat, peut se permettre d’user et d’abuser du pouvoir absolu, son successeur, quelle que soit l’étendue de sa victoire électorale ne pourra en aucun cas le faire. Les contre-pouvoirs réels existant dans la Constitution actuelle (pour peu que leurs détenteurs veuillent bien les utiliser) et surtout les autres centres du pouvoir (politique, judiciaire, militaire et aussi d’argent) ne permettront certainement pas à son successeur de disposer des mêmes prérogatives que lui. C’est probablement l’une des raisons qui le poussent à une réforme en profondeur de la Loi fondamentale. Il veut laisser à son successeur, qu’il aura lui-même choisi, pour son appartenance au clan ou pour sa fidélité, les pleins pouvoirs que seule une Constitution de type présidentiel lui permettra. Personne ne pourra le mettre en situation de «trois-quarts de Président» dans laquelle il avait été lui-même mis quand il avait été «élu» président de la République en avril 1999 et de laquelle il avait réussi difficilement à se sortir.
Le seul vrai objectif de la révision constitutionnelle : réussir la succession et protéger le clan
Depuis déjà le début de son deuxième mandat et l’annonce de sa mystérieuse maladie en novembre 2005, la question se posait sur la manière dont se déroulerait sa succession. Et même quand il avait réformé à la hussarde la Constitution pour supprimer la limitation du nombre de mandats pour postuler à un troisième, c’était avant tout pour se donner le temps et les moyens de réussir sa succession à la tête de l’Etat. Longtemps avait circulé la rumeur d’une succession en famille. Une rumeur qui aurait pu devenir une réalité si les événements de Tunisie, d’Egypte, de Libye et d’ailleurs n’étaient venus remettre en question le scénario déjà écrit mais devenu trop risqué à mettre en images et en musique. Exit, au moins pour un temps, le temps que les images du Printemps arabe s’estompent ou se transforment en hiver arabe, la piste longtemps préparée de Saïd Bouteflika, successeur et continuateur de l’œuvre de son frère. Il fallait donc trouver une autre piste qui recevra l’aval des tenants du système actuel, parce qu’elle garantira sa pérennité et sauvegardera pour très longtemps encore ses intérêts. Et c’est cette piste qui est en train de se mettre petit à petit en place.Depuis le début de l’année 2011, le président Bouteflika a mis en œuvre un scénario secret et machiavélique pour réussir la seule chose qui compte réellement pour lui depuis l’aggravation visible de son état de santé : réussir une succession qui lui survivra et qui pérennisera les intérêts de son clan familial. Dans un premier temps, pour donner de lui et de son système politique une image très éloignée des dictatures arabes en crise et en décomposition, il avait annoncé et mené au pas de charge toute une série de pseudo réformes politiques qui n’ont absolument rien changé à la situation, quand elles ne l’ont pas aggravée : code communal, loi sur l’information, code électoral, loi sur les partis politiques, etc. Résultat, le nombre de partis politiques agréés et admis à participer aux élections (législatives, communales et de wilayas) a été plus que doublé. Le champ politique, déjà étroit, a été ainsi rétréci encore plus : les nouveaux partis, incapables de recruter ailleurs qu’au sein de ceux déjà existants, ont créé de scissions au sein de pratiquement toutes les organisations partisanes de toutes les tendances. La victime expiatoire a été sans conteste le camp islamiste, qui avait cru naïvement qu’il allait «cueillir» le pouvoir, tout le pouvoir, à l’image des pays voisins du Maroc jusqu’à l’Egypte en passant par la Tunisie et la Libye.
Résultat : le MSP, qui avait eu l’outrecuidance de se mettre dans l’opposition alors qu’il avait participé à tous les gouvernements mis en place par Bouteflika pour réaliser ses programmes de développement, avait été laminé, et avec lui ses alliés de l’AAL ; les autres partis islamistes n’ont recueilli que des miettes ; tandis que le FFS qui avait répondu au son des sirènes des législatives s’est retrouvé englué dans une crise profonde qui a même emporté Hocine Aït Ahmed, son inamovible président, qui ne se représentera pas pour se succéder à lui-même à la tête du plus vieux parti de l’opposition. Les partis de l’Alliance présidentielle, FLN et RND en tête, ont tout raflé au cours des élections législatives, communales et de wilayas. Deux nouveaux partis sont venus s’ajouter à ceux de l’Alliance et ont profité des quelques miettes : le MPA de Amara Benyounès, représentant la mouvance démocratique, et le TAJ de Amar Ghoul, représentant l’islamisme soft. Le FFS a retrouvé les bancs de l’APN et le PT de Louisa Hanoune a perdu des plumes dans sa politique de «soutien critique» de la politique de Bouteflika. La scène politique est donc restée pratiquement la même qu’avant les réformes : toute à l’avantage du système qui a squatté le pouvoir depuis l’indépendance du pays. Le Président est resté le seul vrai maître du jeu : tout, absolument tout, est soumis à sa seule volonté. C’est lui qui fixe les règles du jeu et c’est lui qui en sort en permanence vainqueur. La suite des réformes, il l’avait annoncée lui-même, le 8 mai 2012 à Sétif, au cours de son dernier discours à la nation, à la veille des élections législatives : ce sera la révision de la Constitution. Le moment est maintenant arrivé pour «tenir» la promesse. Le Président a beaucoup tergiversé sur le moment et le contenu des changements qu’il veut apporter à la Constitution qu’il avait déjà «manipulée» en novembre 2008, pour pouvoir postuler à un troisième mandat.
La grande majorité des analystes de la scène politique algérienne pense que la prochaine révision aura pour objectif premier d’organiser la succession du président de la République pour garantir la pérennité du système tel qu’il a été développé sous le long règne de Bouteflika. Ajoutons que même si une telle solution constitutionnelle n’est pas retenue, compte tenu des résistances réelles à un quatrième mandat, qu’elle suscitera au sein même du sérail, une autre piste pourrait être suivie, qui aurait exactement le même résultat que celui attendu : adouber un «prince héritier» et le faire élire à la prochaine élection présidentielle d’avril 2014. Les analystes et les médias se sont posé la question du retard mis par les pouvoirs publics pour annoncer la date de la révision constitutionnelle. Il semble bien que le Président ait mis deux fers au feu : l’un et l’autre dépendant de l’évolution de son état de santé. C’est de toute évidence l’état de santé du Président qui a fait reculer le plus loin possible la date de la révision de la Constitution. Il s’agissait apparemment de s’assurer que l’évolution implacable de sa maladie ne l’empêchera pas de postuler à un quatrième mandat, quitte à ce que ce quatrième mandat n’aille pas jusqu’à son terme.
L’essentiel est que le troisième, lui, le fasse et que le Président sera, en avril 2014, en mesure de présenter une candidature «physiquement» crédible. Le but visé étant d’être remplacé, le moment venu, par son successeur qu’il aura auparavant désigné, conformément aux dispositions de la nouvelle Constitution révisée. Il semble bien en effet que c’est vers une telle issue que nous amènera l’étape actuelle des «réformes bouteflikiennes». Une Constitution qui, outre un régime présidentiel qui a toujours eu sa préférence, instituera un système de succession «automatique» au profit d’un «prince héritier» constitutionnellement désigné. Tout porte à croire qu’il s’agira d’un vice-président que la nouvelle Constitution lui permettra de désigner lui-même et qui lui succèdera en cas d’empêchement. Compte tenu de l’hypertrophie de l’ego du Président, il serait étonnant que la nouvelle Constitution opte pour un «ticket» président/vice-président, comme cela se fait aux Etats-Unis. Dans cette formule, le vice-président disposera d’une légitimité électorale aussi grande que celle du Président et pourrait le rendre «incontrôlable» pendant toute la période de «cohabitation». Dans le cas où la maladie du Président devient visiblement et inéluctablement invalidante ou si comme semblent le penser beaucoup d’analystes politiques, il devra faire face à une opposition ferme d’une partie des membres influents du système, une autre formule tout aussi motivante pour le clan pourrait être choisie et adoptée : une formule à la Chavez, qui avait désigné un successeur de son vivant sans pour autant, Constitution oblige, qu’il lui succède automatiquement.
Il devra d’abord affronter le suffrage universel et remporter l’élection présidentielle. Une telle formule, si elle ne garantit pas l’élection du «prince héritier», a comme avantage d’être plus «démocratique» et donc de susciter moins de résistance au sein même du pouvoir en place. Dans cette optique, il ne sera pas nécessaire que Bouteflika se présente à un quatrième mandat. Il lui suffira d’adouber, dès le début de l’année 2014, son successeur pour lui ouvrir la voie à une élection certaine. Et c’est là que les résultats des élections législatives de 2012 et la recomposition du champ politique qu’elles ont permis ont leur importance dans le scénario de la succession : les partis de l’Alliance, toutes tendances confondues, représentent une monumentale force de frappe en tant que machine à gagner les élections, quitte à ce qu’elles soient loin d’être transparentes et honnêtes. Le FLN et le RND, qui entre-temps auront surmonté leurs crises internes, prendront fait et cause, de manière volontaire ou forcée, pour le «prince héritier» et mettront à son service leur machine à faire voter. Le TAJ en fera de même : il aura entre-temps renforcé ses rangs et sera d’un apport non négligeable pour le nouveau «candidat du consensus». Le MPA en fera de même. Il sera difficile pour les opposants, ceux qui participeront et ceux qui boycotteront, de résister à une telle force de frappe. A moins que les crises actuelles du FLN et du RND ne persistent et ne viennent fausser tous les calculs. Il est vraiment difficile de croire à un tel scénario : il équivaudra à un véritable suicide politique et au début de la fin du système mis en place depuis juillet 1962.
Quid du «Prince héritier» ?
Quelle que soit l’importance de la révision constitutionnelle annoncée et le rééquilibrage des pouvoirs auxquels elle parviendra, c’est surtout le mode de succession qui sera utilisé (constitutionalisé ou pas) qui sera le plus scruté par les observateurs. Et la question «Majuscule» sera de connaître le nom du «prince héritier». Est-il déjà choisi ? Fait-il déjà partie de la liste des noms qui circulent depuis un moment ? Serait-ce une personnalité totalement nouvelle ? Aucune réponse n’est possible dans l’état actuel des informations disponibles. Ce qu’il est assez loisible d’affirmer, c’est que les crises du FLN et du RND ont mis fin aux ambitions de
Belkhadem et de Ouyahia. Ils ont été les victimes de leurs ambitions présidentielles trop vite annoncées. De toutes les façons, aucun des deux n’a le profil du «prince héritier».Avec eux, les intérêts du clan Bouteflika ne pourront pas être protégés, même si, avec chacun d’entre eux, le système en place ne fera que se succéder à lui-même. Parmi les noms qui circulent (certainement des ballons d’essai), l’on retrouve les noms de Mouloud Hamrouche et Ali Benflis. A mon avis, les deux ont peu de chances d’être adoubés par le Président : le premier parce qu’il traîne des casseroles avec sa gestion catastrophique du FIS du temps où il était Premier ministre, et aussi parce qu’il a toujours voulu être le candidat de l’armée. Le deuxième parce qu’il avait eu l’outrecuidance de s’opposer à Bouteflika en 2004. Bouteflika, c’est connu, ne pardonne jamais à ceux qui l’ont «trahi». Il reste le mystère Sellal. Sa nomination au poste de Premier ministre, ses compétences managériales, sa proximité avec le clan Bouteflika, sa fidélité proclamée au chef, son absence d’ambition présidentielle, tout cela peut faire de lui l’homme idoine pour succéder au Président dès 2014. Etant entendu que le moment venu, en 2019, il cède la place au véritable «prince héritier», un membre de la famille Bouteflika. Pourquoi pas Saïd, qui n’a certainement pas renoncé, loin de là, à l’ambition de succéder à son frère ?
Rachid Grim. Politologue